9 décembre 2013

L'écorchée, de Donato Carrisi : la solitaire et le misanthrope

Les (très) nombreux lecteurs qui ont à la fois adoré Le chuchoteur et cauchemardé pendant des nuits après leur lecture attendaient avec impatience la suite de leur épreuve ! Eh bien la voilà, et elle n'est pas contente. Elle s'appelle L'écorchée. Ca promet. Est-ce que ça tient ? A vous de voir...
Mila Vasquez, l'héroïne du premier roman, travaille maintenant aux Limbes, le service où l'on s'occupe des disparus. Un service où l'on n'a guère envie de travailler, à la fois méprisé et craint par le reste de la police. Comme dans Le Chuchoteur, on ne sait pas où on se trouve, on navigue dans un monde où les villes et les rues n'ont pas de nom, un flou qui accentue encore l'atmosphère morbide de l'histoire.

Des meurtres. En série. Les meurtriers sont des personnes disparues. Mila Vasquez a du pain sur la planche, et va trouver de l'aide en la personne de l'enquêteur Simon Berish, paria de la police locale revenu aux affaires après avoir été mêlé à une sombre affaire de corruption. Ce Simon Berish que tout le monde déteste a un précieux atout dans sa manche : les gens, tous les gens lui parlent. Beau couple : Mila, solitaire, froide, marquée à vie par ce qu'elle a vécu. Simon, misanthrope, angoissé, marqué à vie par son histoire avec Silvia, une disparue. Mila et sa fille Alice, qui vit chez sa grand-mère. Simon et son chien fidèle. Quand deux parias se rencontrent, que croyez-vous qu'il arrive ? Ils font une bonne équipe.  Pourquoi ces disparus sont-ils devenus des assassins ? Pourquoi se mettent-ils à tuer tous en même temps? Terrorisme, secte, ou pire encore ? 

L'écorchée séduira certainement les lecteurs fidèles de Donato Carrisi. Mais s'il a, pour ce roman, partiellement évité le principal défaut de son précédent livre, Le tribunal des âmes, à savoir la multiplication des événements, des intrigues parallèles, des pistes nouvelles qui jaillissaient pratiquement à chaque page, laissant le lecteur un peu hagard, il n'a malheureusement pas réussi à contourner un écueil de taille : sa propension à expliquer au lecteur ce qu'il doit conclure de l'événement qui vient de se produire. Dans le dernier tiers du livre, Carrisi joue les professeurs de psychologie, et à aucun moment ne laisse son lecteur conclure et réfléchir comme il l'entend. Ce qui a pour effet d'alourdir encore un texte au style parfois laborieux. Dommage, car l'intrigue, si elle n'est pas révolutionnaire, tient debout, et le thème des personnes disparues est fascinant en soi. Néanmoins, Carrisi réussit par moments à créer des atmosphères quasi-lynchiennes (période Twin Peaks), en particulier avec la chambre 317 de l'hôtel Ambrus, un des lieux clés du roman. Donato Carrisi a un univers bien à lui, mais on aimerait davantage de précision et d'audace dans le style. On aimerait surtout qu'il résiste à la tentation des fioritures et qu'enfin, il fasse confiance à l'intelligence de son lecteur. Car on a la désagréable sensation qu'il a besoin d'expliquer une profondeur qu'il craint que le lecteur ne trouve pas tout seul...

Donato Carrisi, L'écorchée, traduit de l'italien par Anaïs Bokobza, Calmann-Lévy

1 commentaire:

  1. Merci beaucoup pour cet avis. J'ai hâte de lire ce roman, Donato Carrisi a sû m'envôuter à chacun de ses romans.

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