Vous me connaissez un peu, je ne suis pas très "thrillers". Sauf exceptions. Par exemple Val McDermid, mais là on pourrait dire que Val n'a pas son pareil pour parler du monde qui l'entoure. Et puis Paul Cleave. Et là, je n'ai même pas cette excuse-là. Quoique... En fait, Paul Cleave me fait vraiment peur, peut-être est-ce là son secret... Avec Un prisonnier modèle, Cleave nous raconte la suite de la drôle de vie de Joe Middleton, alias le Boucher de Christchurch, dont nous avions fait la connaissance dans le premier roman de l'auteur traduit en français, Un employé modèle (voir chronique ici), et dont l'auteur nous a donné, discrètement, des nouvelles dans ses autres romans. Car il a quand même fallu 7 ans à Paul Cleave pour donner naissance à cette suite, qui n'a pas grand-chose à envier à son prédécesseur, hormis l'effet de surprise.
L'actualité totalement subjective du roman policier et du roman noir, films, salons, rencontres avec des auteurs,...
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8 mai 2016
2 janvier 2013
Avec Nécrologie, Paul Cleave torture son lecteur... consentant
Le nouveau Paul Cleave sort dans quelques jours, les fans sont en transe ! Ils vont être servis... Déjà dans Un père idéal, Cleave nous avait sevré de l'humour noirissime qui faisait de L'employé modèle un roman dont la cruauté extrême était pimentée par le sourire en coin qu'il savait nous arracher aux pires moments de l'action. Oui, décidément, Cleave s'en va vers le noir, le très noir, voire le cauchemardesque. Une fois Nécrologie refermé, on éprouve un sentiment vaguement nauséeux, une fatigue extrême d'avoir passé 430 pages avec un auteur qui ne nous a laissé aucun répit, nous maintenant tout au long du roman dans une atmosphère lourde, menaçante, crépusculaire. N'empêche, on n'a pas lâché l'affaire, car Paul Cleave a un sens du rythme confondant !
19 mai 2011
Paul Cleave, l'auteur de "Un employé modèle", thriller glaçant et jouissif, répond gentiment à nos questions...
LBdP : Un employé modèle est votre premier roman. Vous dites que vous avez toujours voulu écrire, mais pourquoi avez-vous choisi le thriller?
PC : En fait j'ai toujours voulu écrire de l'horreur. Et encore maintenant. C'est ce que je lis la plupart du temps, depuis vingt ans. C'est aussi par ce genre que j'ai démarré dans l'écriture.
LBdP : Qui sont les romanciers qui vous ont donné envie d'écrire en général, et d'écrire ces livres-là en particulier ?
PC : Stephen King et Dean Koontz. Puis, il y a 10 ans, je me suis mis à lire les livres écrits par un profiler du FBI, des ouvrages qui traitaient de crimes réels - et j'ai compris que la véritable horreur, c'était le crime, dans la vie quotidienne, alors je me suis dit que je devrais essayer d'écrire quelque chose qui se rapproche du roman policier. En même temps, j'ai commencé à lire Lee Child, qui venait de sortir son premier livre. C'est là que je suis devenu vraiment auteur de romans policiers.
LBdP : Vous voyagez maintenant dans le monde entier pour présenter vos romans, percevez-vous une différence entre les réactions de vos lecteurs en fonction de leur pays d'origine?
PC : En fait, c'est la première fois que je fais vraiment de la promotion. Je suis encore peu connu, et je n'ai pas été invité à plus de deux festivals de littérature ces dernières années.
LBdP : Dans quelle mesure votre contexte géographique a-t-il influencé votre travail?
PC : Beaucoup, en fait. J'adore situer mes romans à Christchurch : c'est ma ville, c'est là que je vis, et il m'est facile de la décrire. Je sais combien de temps il faut pour aller d'un point A à un point B. En plus, j'ai la sensation que j'ai le droit de dire ce que je veux sur ma ville - je peux raconter des horreurs parce que j'y habite. J'adore ma ville, et si j'en fais une description noire, c'est parce que cela me permet d'obtenir un contexte plus intéressant pour mes livres.
LBdP : Dans Un employé modèle, votre héros parle de Christchurch comme si c'était l'enfer sur terre, alors qu'un autre personnage, Sally, compare la ville à un paradis. Où vous situez-vous ?
PC : J'adore Christchurch. Ce sont les personnages qui en ont une vision négative. Bien sûr, il y a des endroits que je déteste dans cette ville. Je me concentre sur ceux-là dans mes livres. Après le tremblement de terre qui a frappé la région, je me dis que je devrais peut-être y aller plus doucement. Je ne sais pas...
LBdP : L'humour est important dans votre écriture. Est-ce que cela fait partie intégrante de votre vie, ou est-ce nécessaire pour rééquilibrer l'horreur des situations que vous créez ?
PC : C'est exactement ça, j'ai toujours procédé ainsi. Si vous enlevez l'humour de Un employé modèle, il reste un livre très sombre, très tordu, que personne n'aurait envie de lire. Mon objectif est d'écrire des histoires noires, mais de faire rire le lecteur tout du long, soit à cause des situations, soit à cause des dialogues.
LBdP : Vos personnages sont absolument uniques. On a le sentiment qu'aucun psy vivant ne serait capable de rendre compte de leur bizarrerie. Avez-vous quelque chose contre les psys ?
PC : Non, rien ! J'essaie juste d'écrire différemment. Je veux que mes personnages soient mémorables.
LBdP : Quelle impression cela fait-il d'être obligé de parler d'un roman que vous avez écrit il y a plus de dix ans déjà ?
PC : C'est formidable qu'un livre écrit il y a si longtemps semble tout nouveau dans un autre pays. Cela me plaît. C'est vrai que c'est parfois délicat, car il m'arrive de ne plus me souvenir exactement de ce qui s'y passe - mais en général on m'aide, alors tout va bien ! Cela me rend toujours heureux d'être publié dans un nouveau pays.
LBdP : Réécrivez-vous beaucoup ?
PC : Pour Un employé modèle, j'ai réécrit au moins 20 vingt fois. Pour Blood Men (le prochain roman à paraître fin 2011 sous le titre d'Un père idéal), cinq peut-être. Maintenant, dans la plupart des cas, je réécris quatre ou cinq fois. J'ai acquis de l'expérience avec les années.
LBdP : Qui sont vos premiers lecteurs (en-dehors de votre éditeur)?
PC : Mon ami David est le premier à lire mes manuscrits. Je lui donne une copie, il la lit, je la lui renvoie quelques semaines plus tard. Autrefois, je les faisais lire à mes parents, mais plus maintenant. Aujourd'hui, ils attendent le produit fini.
LBdP : Comment ont réagi vos amis et votre famille lorsqu'ils ont lu Un employé modèle ?
PC : Ah, bonne question ! Mes amis ont adoré, mais certaines de leurs épouses étaient un peu inquiètes - l'une d'entre elles a demandé à mon meilleur ami : "Il ne t'inquiète pas un peu, Paul ?" Il a fallu six ans pour que ce livre soit publié, et pendant tout ce temps je ne l'ai pas donné à mes parents parce que je m'étais un peu servi de ma propre mère pour le personnage de la mère de Joe. Ça m'inquiétait un peu. Mais ma mère a adoré - elle l'a trouvé très fort. Attention, elle n'était pas du tout comme celle de Joe. J'ai juste utilisé quelques petits trucs bizarres qu'elle faisait, et je les ai exagérés.
LBdP : Votre prochain roman à paraître en France à la fin de l'année s'appelle Un père idéal. Est-il très différent d'Un employé modèle? J'ai cru comprendre qu'il s'agissait d'un homme ordinaire confronté à l'assassinat de sa femme, et qui n'a plus d'autre choix que de se tourner vers son père, un "serial killer" qui est encore en prison. Est-ce un livre qui parle des gens ordinaires qui doivent affronter des circonstances extraordinaires, ou un roman qui traite d'une relation père-fils un peu monstrueuse ?
PC : Ce livre est mon quatrième. D'une certaine manière, j'y ai combiné certains éléments des trois premiers. Il est plus proche de Un employé modèle que des autres dans la mesure où il est écrit du point de vue de l'assassin, là encore. Mais c'est un brave type - il n'a aucune intention de devenir un assassin. Simplement, il lui arrive des choses sur lesquelles il n'a aucun contrôle. En fait, c'est mon roman préféré.
Paul Cleave, Un employé modèle, traduit de l'anglais (Nouvelle-Zélande) par Benjamin Legrand - Sonatine
8 mai 2011
Paul Cleave : "Un employé modèle", un polar des antipodes

Pour lire Un employé modèle, il faut avoir le cœur bien accroché. Pas à cause des scènes de violence : celles-ci sont bien présentes, mais racontées avec un tel calme qu'on s'en offusque à peine. Les montagnes russes commencent dès la dernière phrase de la deuxième page. Tout va bien, on ne s'en fait pas, un type rentre chez lui après une rude journée de labeur, il se sert deux bières bien fraîches et une part de pizza. Normal, cool. Quelques lignes plus loin, le cauchemar commence. Je ne vais pas vous gâcher le plaisir de la découverte... Mais attention, car dès ce moment-là, plus question de lâcher le livre.
Vous êtes dans la peau d'un serial killer, et ça n'est pas facile tous les jours... Joe Middleton est employé d'entretien au commissariat de la ville, où il passe pour un neuneu. Comédien hors pair, il manie la serpillière, avec aux lèvres un éternel sourire un peu niais. Pour les flics et le reste du personnel, il fait quasiment partie des meubles, sauf pour la gentille Sally, un peu bébête pour de bon elle, mais le cœur sur la main, qui s'offre un petit coup de foudre pour ce pauvre Joe qui lui rappelle tellement son petit frère mort. Jour après jour, la vie s'écoule pour Joe entre le balai, l'éponge et Sally, ponctuée par des visites à sa vieille mère veuve abusive, amnésique et fans de puzzles et par de passionnantes conversations avec ses meilleurs amis, Cornichon et Jéhovah, deux poissons rouges. A part ça... la routine : un petit meurtre par-ci par-là, il faut bien faire ses devoirs... Des meurtres particulièrement horribles et habilement préparés, qui sèment la terreur auprès des femmes de la ville. Joe n'a pas vraiment de critère : ses victimes peuvent être de bonnes bourgeoises ou des putes, le tout étant qu'elles soient là où il ne faut pas, quand il ne faut pas. Vu son lieu de travail, il est aux premières loges de l'investigation, qu'il suit minutieusement, surtout à partir du jour où un crime qu'il n'a pas commis lui est imputé. Là, vexé comme un pou, il prend le coup de sang et se met à enquêter pour de bon. Et comme il est loin d'être bête...
Des romans et des films en réalité subjective - Le meurtre de Roger Ackroyd, d'Agatha Christie, La dame du lac, de Robert Montgomery, en particulier, où Montgomery lui-même joue le rôle de Philip Marlowe - où on est dans la peau du tueur, on en a déjà vu et lu. Dans 90% des cas, on finit par se lasser de ce parti pris qui prend vite l'apparence d'un procédé et qui détourne notre attention de l'intrigue et de l'écriture. Là, Paul Cleave réussit le tour de force de nous embarquer sans qu'on aie le temps de se poser la moindre question sur la validité de la méthode. Plus fort encore, il fait passer son personnage du rôle de bourreau à celui de victime, ce qui lui permet de nous proposer, en quelque sorte, l'envers du décor. Très fort! Si on ajoute que l'écriture, tout en pirouettes, ne nous laisse pas souffler, et qu'en plus Cleave fait preuve d'un humour ravageur qui n'enlève rien à l'horreur de la situation, vous n'aurez plus d'autre choix que de filer ventre à terre chez votre libraire préféré.
Un employé modèle, de Paul Cleave, traduit de l'anglais (Nouvelle-Zélande) par Benjamin Legrand - Sonatine
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