19 mai 2011

Paul Cleave, l'auteur de "Un employé modèle", thriller glaçant et jouissif, répond gentiment à nos questions...

Après avoir lu et chroniqué Un employé modèle (lire la chronique), la blogueuse n'était pas très fière à l'idée d'en rencontrer l'auteur... Quel esprit à la fois brillant et inquiétant avait bien pu accoucher d'une telle histoire ? Eh bien la réalité est encore pire que la fiction : Paul Cleave est absolument charmant. Ça fait peur, non ?

LBdP :  Un employé modèle est votre premier roman. Vous dites que vous avez toujours voulu écrire, mais pourquoi avez-vous choisi le thriller?
PC : En fait j'ai toujours voulu écrire de l'horreur. Et encore maintenant. C'est ce que je lis la plupart du temps, depuis vingt ans. C'est aussi par ce genre que j'ai démarré dans l'écriture.

LBdP : Qui sont les romanciers qui vous ont donné envie d'écrire en général, et d'écrire ces livres-là en particulier ?
PC : Stephen King et Dean Koontz. Puis, il y a 10 ans, je me suis mis à lire les livres écrits par un profiler du FBI, des ouvrages qui traitaient de crimes réels - et j'ai compris que la véritable horreur, c'était le crime, dans la vie quotidienne, alors je me suis dit que je devrais essayer d'écrire quelque chose qui se rapproche du roman policier. En même temps, j'ai commencé à lire Lee Child, qui venait de sortir son premier livre. C'est là que je suis devenu vraiment auteur de romans policiers.

LBdP :  Vous voyagez maintenant dans le monde entier pour présenter vos romans, percevez-vous une différence entre les réactions de vos lecteurs en fonction de leur pays d'origine?
PC : En fait, c'est la première fois que je fais vraiment de la promotion. Je suis encore peu connu, et je n'ai pas été invité à plus de deux festivals de littérature ces dernières années.

LBdP :  Dans quelle mesure votre contexte géographique a-t-il influencé votre travail?
PC : Beaucoup, en fait. J'adore situer mes romans à Christchurch : c'est ma ville, c'est là que je vis, et il m'est facile de la décrire. Je sais combien de temps il faut pour aller d'un point A à un point B. En plus, j'ai la sensation que j'ai le droit de dire ce que je veux sur ma ville - je peux raconter des horreurs parce que j'y habite. J'adore ma ville, et si j'en fais une description noire, c'est parce que cela me permet d'obtenir un contexte plus intéressant pour mes livres.

LBdP :  Dans Un employé modèle, votre héros parle de Christchurch comme si c'était l'enfer sur terre, alors qu'un autre personnage, Sally, compare la ville à un paradis. Où vous situez-vous ?
PC : J'adore Christchurch. Ce sont les personnages qui en ont une vision négative. Bien sûr, il y a des endroits que je déteste dans cette ville. Je me concentre sur ceux-là dans mes livres. Après le tremblement de terre qui a frappé la région, je me dis que je devrais peut-être y aller plus doucement. Je ne sais pas...

LBdP :  L'humour est important dans votre écriture. Est-ce que cela fait partie intégrante de votre vie, ou est-ce nécessaire pour rééquilibrer l'horreur des situations que vous créez ?
PC : C'est exactement ça, j'ai toujours procédé ainsi. Si vous enlevez l'humour de Un employé modèle, il reste un livre très sombre, très tordu, que personne n'aurait envie de lire. Mon objectif est d'écrire des histoires noires, mais de faire rire le lecteur tout du long, soit à cause des situations, soit à cause des dialogues.

LBdP :  Vos personnages sont absolument uniques. On a le sentiment qu'aucun psy vivant ne serait capable de rendre compte de leur bizarrerie. Avez-vous quelque chose contre les psys ?
PC : Non, rien ! J'essaie juste d'écrire différemment. Je veux que mes personnages soient mémorables.

LBdP :  Quelle impression cela fait-il d'être obligé de parler d'un roman que vous avez écrit il y a plus de dix ans déjà ?
PC : C'est formidable qu'un livre écrit il y a si longtemps semble tout nouveau dans un autre pays. Cela me plaît. C'est vrai que c'est parfois délicat, car il m'arrive de ne plus me souvenir exactement de ce qui s'y passe - mais en général on m'aide, alors tout va bien ! Cela me rend toujours heureux d'être publié dans un nouveau pays. 

LBdP :  Réécrivez-vous beaucoup ?
PC : Pour Un employé modèle, j'ai réécrit au moins 20 vingt fois. Pour Blood Men (le prochain roman à paraître fin 2011 sous le titre d'Un père idéal), cinq peut-être. Maintenant, dans la plupart des cas, je réécris quatre ou cinq fois. J'ai acquis de l'expérience avec les années.

LBdP : Qui sont vos premiers lecteurs (en-dehors de votre éditeur)?
PC : Mon ami David est le premier à lire mes manuscrits. Je lui donne une copie, il la lit, je la lui renvoie quelques semaines plus tard. Autrefois, je les faisais lire à mes parents, mais plus maintenant. Aujourd'hui, ils attendent le produit fini.

LBdP : Comment ont réagi vos amis et votre famille lorsqu'ils ont lu Un employé modèle ?
PC : Ah, bonne question ! Mes amis ont adoré, mais certaines de leurs épouses étaient un peu inquiètes - l'une d'entre elles a demandé à mon meilleur ami : "Il ne t'inquiète pas un peu, Paul ?" Il a fallu six ans pour que ce livre soit publié, et pendant tout ce temps je ne l'ai pas donné à mes parents parce que je m'étais un peu servi de ma propre mère pour le personnage de la mère de Joe. Ça m'inquiétait un peu. Mais ma mère a adoré - elle l'a trouvé très fort. Attention, elle n'était pas du tout comme celle de Joe. J'ai juste utilisé quelques petits trucs bizarres qu'elle faisait, et je les ai exagérés.

LBdP : Votre prochain roman à paraître en France à la fin de l'année s'appelle Un père idéal. Est-il très différent d'Un employé modèle? J'ai cru comprendre qu'il s'agissait d'un homme ordinaire confronté à l'assassinat de sa femme, et qui n'a plus d'autre choix que de se tourner vers son père, un "serial killer" qui est encore en prison. Est-ce un livre qui parle des gens ordinaires qui doivent affronter des circonstances extraordinaires, ou un roman qui traite d'une relation père-fils un peu monstrueuse ?
PC : Ce livre est mon quatrième. D'une certaine manière, j'y ai combiné certains éléments des trois premiers. Il est plus proche de Un employé modèle que des autres dans la mesure où il est écrit du point de vue de l'assassin, là encore. Mais c'est un brave type - il n'a aucune intention de devenir un assassin. Simplement, il lui arrive des choses sur lesquelles il n'a aucun contrôle. En fait, c'est mon roman préféré. 

Paul Cleave, Un employé modèle, traduit de l'anglais (Nouvelle-Zélande) par Benjamin Legrand - Sonatine

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