Cela fait trois bouquins qui me tombent des mains pour de bonnes et mauvaises raisons. Et pourtant ils sont de la main d'auteurs célèbres (dont je tairai le nom par égard pour leur notoriété), réputés pour leur savoir-faire et leur originalité. Il y a comme un malaise ! Y aurait-il une saturation côté polar? Une agueusie soudaine qui ferait perdre le plaisir du genre? Car attention au même moment j'ai avalé sans sourciller un Frison Roche, un Dumas et un Genevoix sans même m'apercevoir que je chaussais mes lunettes tellement c'était délectable. Après évocation du symptôme avec le docteur es-polar du Blog il semblerait que cela vienne en fait d'une surconsommation de séries télé.
Les scénaristes, devenus avec le temps talentueux, ayant détrôné les auteurs en leur empruntant un savoir-faire ancestral, un sens de l'intrigue et des dialogues qu'ils nous distillent habilement comme une drogue addictive et sournoise aux conséquences irréversibles. Bon sang, mais c'est bien sûr ! C'est vrai qu'autrefois, je parle de la fin des années 60, il n'y avait à la télé que peu de "séries noires" bien ficelées. Du coup les auteurs de romans (les vrais, les novateurs, les inventifs) avaient une autoroute devant eux pour s'exprimer alors qu'aujourd'hui les Experts et compagnie ont posé une chape de béton sur le sujet qui oblige les romanciers à inverser le processus en jouant leur jeu. Forçant les maîtres du polar à construire leur récit sur le même mode narratif, suspens à la fin de chaque chapitre, rebondissement obligatoire toutes les trente pages et tutti quanti. Du coup une poule n'y retrouve plus ses poussins et moi je me lasse. Qu'est-ce que je dois faire docteur ?
"C'est très simple" m'a répondu l'homme de l'art. "Tu éteins ta télé dès qu'apparait un générique de série américaine, tu monte sur ton escabeau et tu ressors de ta bibliothèque quelques bons vieux classiques des années 40 à 60 du genre Chester Himes, Chandler, Agatha Christie... Ensuite tu commences ta cure de désintoxication en lisant un de ces chefs d’œuvre au moins une heure par jour le soir avant de t'endormir. En deux ou trois mois tu devrais sentir un mieux".
"Merci docteur, je vous dois combien?"
"C'est gratos amigo et c'est valable pour tous ceux qui sont dans le même cas" a-t-il ajouté en rangeant son stéthoscope au fond de sa mallette en cuir beige.
Je m'en remets donc à cet expert, (ah non pas encore eux!), alors disons au savoir-faire du maître et je commence ma cure dès ce soir avec rien moins que Adieu ma jolie de Raymond Chandler. On verra bien !
Attention tout de même à ne pas passer à côté d'une série comme "The Wire" ou encore la première saison de Oz ou American Horror Story... Pour ce qui est de la production des polars à l'heure actuel je me permets de mettre ici un lien vers Duclock et l'article "Glissement de Terrain" qui me semble tout à fait à propos avec ce que vous dites là... : http://duclock.blogspot.com/2011/02/glissement-de-terrain.html
RépondreSupprimerBonjour,
RépondreSupprimerMerci de tirer le signal d'alarme. C'est pas facile j'en conviens. En tout cas c'est bien vu. La prescription a fait ses preuves, je confirme. Cela dit je ne fais pas tout à fait la même analyse rapport aux séries tv. Les ondes passent pas dans mon bled. Alors que se passe-t-il bon sang? J'ai ma petite idée. Mais bon... B. http://blugeon.blogspot.com/
Et puis il ne faut pas oublier les auteurs actuels qui tiennent la route : Jérémie Guez, Abdel Hafed Benotman, Jean Paul Jody, Thierry Marignac, Dominique Manotti, Louis Sanders, William Bayer... du c^oté de chez les Fondu Au Noir : http://fonduaunoir44.blogspot.com/ il y a de quoi faire.
RépondreSupprimerMerci dj pour ces commentaires. Jérémie Guez est en lecture, Marignac déjà chroniqué et aimé ici, comme Manotti, Benotman toujours dans la fameuse pile qui ne diminue jamais... Je prends bonne note de vos suggestions, j'aurais tendance à vous faire confiance, allez savoir pourquoi. C'est vrai qu'il y a des séries formidables, mais elles sont de l'ordre de la goutte d'eau dans l'océan... et pas toujours faciles à se procurer.
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