Avec
Les derniers jours des fauves, l'auteur revient à la veine du thriller politique, dans la lignée du
Bloc (voir
chronique ici et
interview là) et de
L'Ange gardien (voir
chronique ici). Mais avec ce roman-là, qui sort à quelques semaines des présidentielles, non seulement il tombe à pic, mais en plus il s'enrichit d'une liberté et d'une mélancolie héritées des romans les plus récents de l'auteur, et aussi d'un supplément d'âme et d'esprit à la fois frondeur et pessimiste qui lui donnent une saveur toute particulière.
Jérôme Leroy, au fil de ses romans, entre dans la catégorie des auteurs dont on reconnaît la prose au bout de quelques pages. Le texte vit, le narrateur observe, s'amuse, donne des coups d'accélérateur au bon moment, nous laisse souffler (et penser) au bon moment.
Les deux premiers paragraphes donnent immédiatement le ton. Nathalie Séchard est Présidente de la république.Nathalie Séchard, soixante-deux ans, ex-socialiste, mariée avec Jason Perros, 36 ans, poète à ses heures, a été élue en 2017. Et à la première page, "Nathalie Séchard baise avec ardeur et bonheur." En écoutant Haydn, "ce musicien du bonheur". Nous sommes en 2022, la canicule étouffe le pays, le confinement enferme la population. Pour se faire élire, Nathalie Séchard a ouvert des portes des deux côtés : à droite, Patrick Bauséant, ancien para, ancien fidèle de Pasqua et futur ministre de l'Intérieur du gouvernement Séchard. A gauche, Guillaume Manerville, écolo maire d'une commune du Pas-de-Calais, futur ministre d'État à l'Écologie sociale et solidaire. Le grand écart. Le chapitre s'intitule "Nathalie s'en va" : car Nathalie Séchard ne se représentera pas, c'est décidé. "La présidente est à la tête d'une puissance moyenne où plus rien ne fonctionne très bien." La Sonate 41 en si bémol majeur, primesautière, tout en montées et en descentes chromatiques, accompagne Nathalie jusqu'à l'orgasme...