15 février 2022

Pavel Kreniev, La Neuvième cible : une histoire vraie, réel et géopolitique


Malgré son titre et son sous-titre (Sniper contre sniper), La Neuvième cible n'est pas la dernière production américaine pleine de bruit, de fureur... et de vide. Pavel Kreniev est un romancier reconnu, vice-président du conseil d’administration de l’Union des écrivains de Russie; son œuvre a été récompensée par de nombreux prix littéraires et traduite dans plusieurs langues. Avec La Neuvième cible, dont l'histoire est inspirée de faits réels, il réalise le tour de force de nous mettre face à un cas d'école géopolitique tout en nous racontant un destin tragique, véritable roman noir.

Nous sommes en 1992, en Transnistrie. Un État aujourd'hui encore considéré par les instances internationales comme faisant partie de la Moldavie. A l'époque, l'URSS vient de s'effondrer, et la région constitue un enjeu convoité à la fois par la Moldavie, la Russie et la Roumanie. L'Ukraine est également frontalière... 

L'instabilité est à son comble et aboutit à ce qu'on appellera la guerre du Dniestr, du nom du fleuve qui traverse le pays. Le conflit oppose l'armée transnistrienne (soutenue par la Russie) aux forces armées moldaves et le combat se mène à coups d'escarmourches, de bombardements et de snipers embusqués qui réussissent à mener de nombreux attentats, semant la terreur dans la population. A Tiraspol, capitale du pays, Nikolaï Gaïdamakov a été envoyé de Moscou. Sa mission: mettre fin à ces attaques. Le dernier sniper en date a fait 32 victimes... Ses positions de tir ? Les greniers de plusieurs immeubles de la ville. Il va donner du fil à retordre à notre malheureux Nikolaï, qui a lui-même une formation de tireur d'élite. "Éteindre" ce sniper, c'est une priorité. Et pour cela, il faut commencer par comprendre comment il travaille. Comment il choisit ses positions et ses cibles, quelles sont ses méthodes de camouflage, ses techniques de fuite.... Heureusement, Nikolaï vit avec Linda, une commerçante du marché local avec qui il nourrit de beaux projets d'avenir, et qui lui offre un peu de répit et de bonheur. 

Tiraspol, au bord du Dniestr

La situation est d'autant plus explosive qu'une grande réunion se prépare chez le président de Moldavie, qui réunira les représentants des forces de sécurité de Roumanie, de Moldavie et de Russie. On redoute un attentat contre le général-major russe Lebed, qui provoquerait une crise sans précédent. Nikolaï a la pression, comme on dit... Il faut absolument arrêter le sniper avant l'événement. Et ça n'est pas une mince affaire. Le théâtre des attaques : les berges du Dniestr. La tension est à son comble, on a exploré et fouillé à peu près toute la ville pour tenter de dénicher le lieu de l'attaque. En vain... 

Dans La Neuvième cible, Pavel Kreniev use de tout son talent de narrateur pour rendre son histoire passionnante de bout en bout, tout en décrivant un épisode de l'histoire qu'on a oublié, et qui, selon certains, recélerait même les germes des crises ukrainiennes successives. Efficace, prenant, sobre, superbement construit, le roman se termine sur deux coups de théâtre, et laisse le lecteur sonné, ému, et un peu moins ignorant. 

Pavel Kreniev, La Neuvième cible, traduit du russe par Thierry Marignac, La Manufacture de livres

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