31 juillet 2011

"Lady Jane", film noir désenchanté de Robert Guédiguian

Jetant un œil distrait sur un rayon DVD d'occasion, je suis tombée en arrêt devant ce Lady Jane signé Robert Guédiguian. Aucun souvenir d'avoir lu la moindre critique sur ce film sorti en 2008, pas le moindre souvenir non plus d'avoir entendu dire que Robert Guédiguian faisait dans le film noir. Curiosité, quand tu nous tiens... DVD acheté, film vu le soir même !
Robert Guédiguian nous a habitués à la chaleur: la chaleur humaine, celle du soleil de Marseille et des accents chantants. Dans Lady Jane, il fait incontestablement moins chaud que dans Marius et Jeannette, mais on n'en a pas moins le cœur serré. Après la chronique du roman de Thierry Crifo La ballade de Kouski, il semblerait que cette semaine soit vouée à la nostalgie. Celle des années 60-70, version activiste très à gauche pour ce film. Lady Jane, c'est le titre d'une chanson des Stones sortie en 1966 sur leur album Aftermath. 1966, c'est aussi l'année où l'héroïne Muriel (Ariane Ascaride), avec sa bande de potes marseillais et idéalistes, volait des manteaux de fourrure pour les redistribuer dans les quartiers pauvres. En 2008, le monde a bien changé. Muriel est maintenant propriétaire d'un magasin de chaussures de luxe baptisé... "Lady Jane", installé sur une jolie place aixoise. Elle est aussi mère d'un ado, qui a pris l'habitude de ne pas nécessairement rentrer à l'heure. Ce jour-là, il est plus en retard qu'à l'accoutumée. Et pour cause : il a été enlevé. Muriel reçoit une demande de rançon. Impensable d'appeler les flics, c'est vers ses vieux complices François et René (Jean-Pierre Darroussin et Gérard Meylan) qu'elle va se tourner.

Là, on pourrait imaginer (voire redouter) une ode à l'amitié comme nous en a souvent concocté Guédiguian. On se tromperait lourdement... Le passé qu'on pressent entre ces trois-là est bel et bien révolu, et les sentiments qui restent ressemblent à des étiquettes abandonnées dans la vitrine vide d'un magasin fermé depuis longtemps. Les deux lascars ne sont pas vraiment rentrés dans le rang, eux. L'un d'entre eux officie dans une boîte marseillaise un peu sordide, l'autre est installé sur la côte dans une petite maison de rien du tout, avec sa femme et ses deux filles, il y bricole bateaux et scooters des mers. Mariage raté, couple qui s'effrite, rien de tout cela ne fait vraiment envie. Quant à Muriel, c'est une femme seule, très seule. Une femme qui en a certainement vu de toutes les couleurs. Dure, froide, vieillissante mais belle encore, toute de noir vêtue, Ariane Ascaride campe là un très beau et très singulier personnage de femme en détresse, sans pathos. La brève et dernière aventure qu'elle va vivre avec ses deux anciens amis la laissera encore plus seule qu'avant. Leur parcours chaotique, ponctué de morts violentes sur fond de vengeance froide, laisse le spectateur un peu hagard et incrédule. Un film construit tout en subtilité et en audace, élégant et désespéré. Des comédiens épatants, comme toujours, dans des emplois inattendus. Une belle surprise.

Laurence Fontaine et l'Irlande, une histoire d'amour et de mort dans "Larmes rouges sur Belfast"

Je viens de terminer le roman de Laurence Fontaine, Larmes rouges sur Belfast, à paraître en octobre chez Yoran Embanner. Cette auteure avait remporté l'année passée le prix du Goéland masqué pour son livre Noir dessein en verte Erinn.

Christopher, jeune avocat fraîchement diplômé, pianiste frustré et fils adoptif d'un Anglais influent, fait la rencontre de l'énigmatique violoniste irlandaise Hazel. Désormais, c'en sera fini de ses projets de respectabilité, de mariage de raison. C'est un tout autre avenir qui se dessine pour lui, car Hazel a des révélations à lui faire sur sa véritable origine. Cap sur l'Irlande donc, à la poursuite de fantômes d'une autre époque, mais aussi d'humains bien réels qui ont des comptes à régler. Sur fond de lutte fratricide, Laurence Fontaine redonne vie à des leaders de la lutte armée, aux victimes innocentes de la violence, évoque l'époque où l'IRA terrorisait le Royaume-Uni, et livre une aventure romanesque qui laisse quand même un peu sur sa faim.

Un style qui hésite entre l'écriture classique et quelques envolées lyriques, un goût certain pour la littérature et la poésie, un véritable amour de l'Irlande : voilà la première impression que laisse cette lecture. Laurence Fontaine devrait sans doute "se lâcher" un peu : la sensation de frustration tient largement au fait qu'on ressent une sorte de retenue qui gagnerait à être dépassée. Tel quel, le livre oscille entre l'histoire sentimentale et l'intrigue policière, sans jamais s'investir vraiment dans l'un ou dans l'autre. J'aurais aimé davantage de passion, de colère ou de compassion face à des événements décrits mais pas assez mis en situation.

A titre anecdotique, je conseillerai aussi à son éditeur d'investir dans les services d'un correcteur.  A force de se heurter aux coquilles, le lecteur finit par s'agacer... Bref, globalement, un travail éditorial avec l'auteur aurait pu donner à ce livre ce qui lui manque : une vraie profondeur. On sent cette profondeur-là chez Laurence Fontaine, et malgré ces réticences, c'est avec plaisir que je lirai son prochain livre.

Au sujet de l'Irlande, un conseil de lecture en passant si vous vous intéressez aux luttes qui ont déchiré ce pays et le partagent encore : l'extraordinaire roman de Sorj Chalandon, Mon traître, paru chez Grasset.

Les aventures de Ian Rankin

Vous savez que Ian Rankin passe beaucoup de temps sur Twitter, et moi autant à traquer ses tweets, presque toujours savoureux. La semaine passée, Ian avait rendez-vous avec une photographe pour une séance dans un lieu plutôt touristique et agréable d'Edimbourg. Dix minutes passent, pas de photographe. Ian, patient, passe le temps en twittant et en prenant de zolies photos avec son smartphone. Vingt minutes passent, toujours rien, et pas de message, rien de rien. Les tweeters essaient de le réconforter, mais au bout d'une demi-heure de retard, Ian Rankin envoie un message à la photographe : "Désolé, j'ai d'autres engagements, je m'en vais." De retour en ville, tweet furieux de Ian Rankin (qui a quand même eu l'élégance de ne jamais citer le nom de la poseuse de lapin) ! "Ca m'a quand même coûté 20 livres de taxi, cette histoire." Le lendemain, il reçoit dans une enveloppe un billet de 20 livres accompagné d'un message peu amène, voire insultant, de la famille de la photographe. Et l'affaire fait les choux gras de la presse écossaise... Compatissons !

True Grit, un polar dans l'ouest américain du XIXe siècle

Les frères Coen nous ont habitués aux films noirs, parfois même très noirs, qui entrent parfaitement dans la case polar sans aucune contestation possible. C'est pour cette raison que True Grit, leur petit dernier aujourd'hui disponible en DVD n'est pas un western au sens restrictif mais plutôt un "polar western" que les amateurs de films policiers ne doivent surtout pas ignorer sous prétexte qu'il se passe au XIXe siècle dans l'Ouest américain. Prenons l'histoire : une jeune fille veut venger l'assassinat de son père et fait appel à une sorte de sheriff détective privé à ses heures qui part avec elle à la recherche du présumé coupable. Ils sont aidés par un policier officiel, une sorte d'agent du FBI qui a le droit de poursuivre un fuyard dans tous les états américains. Comment retrouveront-ils la piste du tueur? Comme dans tout polar qui se respecte, en interrogeant des témoins et avec, en plus, un peu de chance. A la fin on a même droit à la confrontation avec une bande de gangsters avec poursuite et coups de feu à gogo. Dans l'action, la jeune fille est blessée et ne doit son salut qu'au courage du détective même si elle y laisse quelques plumes au passage.

Transposez cette histoire dans la Rome antique et vous avez un un polar historique, mettez les protagonistes dans les mêmes conditions à Las Vegas ou Los Angeles et vous aurez un roman à la Connelly, voire Ellroy. Ce film noir est le remake d'un ancien western avec John Wayne dans le rôle du shériff alcoolique. A l'époque il s'agissait bien d'un western car tous les poncifs du genre étaient au rendez-vous alors qu'avec les frères Coen on est plus plus dans l'univers du film noir avec des personnages ambigus, moins manichéens. Même le décor américain des grands espaces est traité différemment, avec des scènes sous la neige éclairées comme dans un thriller. Alors ne boudez pas votre plaisir et ajoutez True Grit à votre vidéothèque, vous ne le regretterez pas.

30 juillet 2011

Prison break, la machine à perdre

Le titre n'est pas totalement innocent, puisque cette série basée sur des évasions multiples a réussi à lasser ses adeptes dont le nombre a tellement diminué lors de la quatrième saison qu'elle a fini par disparaître des programmes. On peut voir sur internet, en tapant le nom de la série dans un moteur de recherche, de jolies courbes qui montrent la chute vertigineuse du nombre des téléspectateurs. Pourtant, le concept avait tout pour réussir, puisqu'il comportait les règles du théâtre classique (unité de lieu, de temps et d'action), le principe tant apprécié de la bande d'individus associés pour le meilleur et pour le pire, le jeune et beau héros ainsi que son inévitable petite amie non moins charmante et la théorie du complot si chère à nos amis américains.

Pour cette première collaboration à ce blog, je me suis donc précipité chez Joseph Gibert, où l'on peut acquérir d'occasion pour une dizaine d'euros chaque saison de cette série diffusée sur le réseau Fox entre 2005 et 2009.

Commençons par enfoncer quelques portes ouvertes. D'abord, c'est facile, et en plus ça ne fait pas mal à l'épaule. Si comme moi vous n'aviez pas eu l'occasion de voir ce feuilleton lors de sa première diffusion en France, vous serez forcément conquis par le mode narratif typiquement addictif, qui oblige pratiquement à voir au moins trois ou quatre épisodes à la suite avant de tomber sur un passage suffisamment calme pour pouvoir appuyer sur le bouton stop du lecteur de DVD. La première saison, qui est certainement la meilleure, nous fait rencontrer les personnages un par un au fur et à mesure de leur apparition et donc du rôle qu'ils vont jouer dans cette évasion spectaculaire. A l'origine de l'histoire, le frère d'un condamné à mort se fait emprisonner pour le faire évader avant la date fatidique. Les scénaristes ont visiblement planché pour que tout le monde y trouve son compte. Si on devait jouer au jeu des 7 familles des détenus de la prison de haute sécurité de Fox River, on noterait les bellâtres pour ces demoiselles, les minorités au crâne rasé et au coeur tendre, les matons corrompus à gros bras, le personnel soignant (et charmant) du pénitencier, et l'inévitable tueur en série, totalement déjanté. Mélangez les cartes, distribuez et roulez jeunesse !

La série est décomposée en 4 parties bien distinctes correspondant chacune à une saison.
1. L'évasion du pénitencier
2. La cavale
3. Nouvel emprisonnement et évasion d'un pénitencier sud-américain
4. La vengeance
Normalement, il y aurait dû y avoir des suites qui se sont résumées à deux petits épisodes vendus séparément.

Beaucoup de bonnes idées innovantes qui laissent à penser que les scénaristes ont dû faire travailler leurs petites cellules grises. En particulier, le plan d'évasion du premier épisode entièrement tatoué sur le corps du héros. En revanche, rendre systématique le principe de la machine à perdre finit par faire sourire. Michael Scofield est le génie et la poisse personnifiés. Pas une fois ce qu'il a programmé dans son projet d'évasion ne fonctionne du premier coup, ce qui provoque une multitude de rebondissements qui participent au suspense. Bien sûr, les personnages sont franchement caricaturaux, frisant parfois le grotesque, mais cela fait partie du charme de ces séries qui ont les yeux plus gros que le ventre. Une quarantaine de minutes par épisode, entrecoupées de nombreux coups de théâtre destinés à glisser des spots publicitaires pour les spectateurs d'outre-Atlantique qui sont habitués aux interruptions volontaires de l'image, c'est évidemment un peu court pour avoir le temps de travailler sur la psychologie, du coup tout est dans l'action et la réaction.

Rédemption à l'américaine et guérisons miraculeuses !

Un autre aspect amusant : l'évolution des méchants en bons qui est systématique. A l'exception du tueur en série qui reste égal à lui-même. Ainsi, l'agent du FBI corrompu et assassin d'un membre de la famille du héros finit par devenir son pote au bout du 4e épisode. Même chose avec l'abominable maton qui n'hésite pas à mettre sa vie en péril pour sauver ceux que, deux saisons plus tôt, il faisait souffrir du mieux qu'il pouvait. Lorsqu'un personnage passe de l'obscurité à la lumière, cela va encore, mais lorsque cela devient un "gimmick", là aussi on frise la caricature. Raymond Chandler répondant à Ian Fleming dans une interview qu'on peut trouver sur le blog reconnaissait que ses personnages avaient tendance à "cicatriser" un peu vite. Avec Prison Break, on frise le miraculeux, puisque par exemple le personnage de Theodore « T-Bag » Bagwell se fait couper la main à la hache et réussit tout de même à courir les champs jusque chez un vétérinaire pour se la faire recoudre. Non content de cette chirurgie pour le moins bizarre, il va devoir se la ré-arracher lui-même quelque temps plus tard pour se libérer d'une menotte qui l'enchaîne à un radiateur. Ceci bien sûr sans aucune conséquence sur sa santé puisqu'il va continuer à massacrer tous ceux qui auront le malheur de se mettre en travers de son chemin. Même chose avec Fernando Sucre qui ramasse une balle perdue dans le ventre et agonise à moitié pendant que la jolie doctoresse le charcute avec une pince dont on n'est pas tout à fait certain qu'elle soit stérile. Le voilà quelques heures plus tard qui gambade aux côtés de la bande de joyeux lurons en faisant juste un petit "Aïe" de rien du tout lorsqu'il s'assoit dans une voiture. Il y a un petit côté "guignol" pour grands enfants dans ce feuilleton et ses personnages, que l'on applaudit sans retenue malgré l'absurdité de certaines situations.

Si vous mettez votre nez dans le premier coffret de cette série, soyez certain que vous ne pourrez quitter ses personnages qu'après 60 heures de poursuites, tabassages, assassinats, trahisons, rédemptions à la pelle ! Alors bon courage et prévoyez un mois de vacances pour partager les aventures de Michael et Lincoln.

En guise de conclusion, j'engage ceux qui se passionnent pour les récits d'évasion à relire Le trou de José Giovanni, qui en plus a le mérite d'être un récit autobiographique, adapté au cinéma en 1959 par Jacques Becker qui lui a d'ailleurs demandé d'écrire le scénario original.

Jeu de l'été sur la route des vacances

A chaque héros de série ou de film son véhicule...
Si vous rencontrez un de ces engins sur la route de vos vacances, saurez-vous à qui il appartient ? La réponse en cliquant ici.

28 juillet 2011

Polar et musique : les Murder Ballads de Nick Cave

S'il y a un disque qu'on ne pouvait pas oublier dans une série "Polar et musique", c'est bien celui-là. Murder Ballads, sorti en 1996, n'est peut-être pas le meilleur album de Nick Cave, mais c'est sûrement le plus fascinant. Concept album ? Oui, ça n'est pas un gros mot après tout. Un beau contraste entre des mélodies plutôt délicates et des paroles d'une cruauté inouïe. Deux duos et demi sur cet album, dont le tubesque Where the Wild Roses Grow, chanté par Nick et... Kylie Minogue, Henry Lee, avec PJ Harvey (on aime mieux)... et un clin d’œil à l'inénarrable Shane McGowan pour une reprise de Death is not the End, de Dylan. Dix ballades, dix histoires sinistres...
Dans Song of Joy la mal nommée, Nick Cave parle d'un homme dont la femme et les trois enfants ont été assassinés.
Stagger Lee est la reprise plus ou moins adaptée d'un traditionnel, et tourne autour de l'histoire du meurtrier du même nom.
Henry Lee est elle aussi une reprise d'un traditionnel.
Lovely Creature parle d'amour et de mort.
Where the Wild Roses Grow... même chose, sur un autre ton.
The Curse of Millhaven, toujours spectaculaire sur scène, raconte l'histoire de Loretta la folle...
Dans Kindness of Strangers, c'est du meurtre d'une jeune fille qu'il s'agit.
Crow Jane est l'histoire de la terrible vengeance d'une femme violée.
O'Malley's Bar
raconte la folie meurtrière d'un homme.
Death is not the end est, paradoxalement, peut-être la chanson la plus gaie de la série.

Les anglophones curieux pourront aller lire les paroles des chansons et se faire une idée plus précise de leur contenu en suivant ce lien

Dans cette vidéo, Nick Cave et ses musiciens parlent de ce disque. En particulier, Nick Cave évoque avec  ironie, et une certaine satisfaction, sa performance à "Top of the Pops", l'émission de variétés emblématique de la télé anglaise, et le contraste entre l'ambiance de l'émission, plutôt bon enfant, et les paroles de la chanson Where the wild roses grow.

Ici, le clip du duo PJ Harvey et Nick Cave (Henry Lee). Magnifique.

Et enfin, une version live et particulièrement fiévreuse de The Curse of Millhaven, filmée à Lyon en 200.1

Faites de beaux rêves, quand même...

Du beau monde à la Mostra de Venise !

La 68e édition de la Mostra de Venise (31 août au 10 septembre) promet d'être passionnante. On y retrouvera David Cronenberg, Steven Soderbergh, Roman Polanski, Abel Ferrara et Philippe Garrel, mais aussi le nouveau thriller politique de et avec George Clooney, Ides of March, qui ouvrira les festivités. Roman Polanski devrait présenter Carnage, avec Jodie Foster, Kate Winslet, Christoph Waltz, John C. Reilly . Adaptation d'une pièce de Yasmina Reza, le film se passe à New York et n'est pas, contrairement à ce que son titre pourrait laisser croire, un film d'horreur ! Quant à David Cronenberg, il apportera sous son bras A Dangerous Method, avec Keira Knightley, Viggo Mortensen, Michael Fassbender et Vincent Cassel. Le réalisateur y développe sa vision de la relation entre Freud et Jung... Abel Ferrara, de son côté, montrera 4:44 Last Day on Earth avec William Dafoe, un film qui se déroule un jour avant la fin du monde.

27 juillet 2011

Le retour de Coppola avec un thriller inspiré par Edgar Allan Poe

Twixt, c'est le titre de ce nouveau film du maître, avec Val Kilmer. Coppola se prépare à présenter son œuvre aux Etats-Unis, et il a choisi d'adapter chaque projection au lieu où le film sera vu (30 villes prévues). L'histoire : le fantôme d'une jeune fille assassinée hante un écrivain... Et l'esprit d'Edgar Poe s'en mêle... Bien sûr, il y aura des scènes en 3D.

A ne pas rater la semaine prochaine, si vous avez envie de rester à la maison devant la télé

Dimanche 31 juillet 20h35 - le désormais traditionnel James Bond du dimanche soir sur France 4. Cette fois, c'est Permis de tuer, avec Timothy Dalton, 16° de la série, sorti en 1989  - Suivi de Au service secret de sa majesté, rediffusion de la semaine dernière.
Dimanche 31 juillet 20h40 - Cruel dilemme : Harry, un ami qui vous veut bien, un thriller de Dominique Moll dont je ne me lasse pas avec Laurent Lucas, Sergi Lopez et Mathilde Seigner, qui réussit à ne pas être insupportable dans ce film-là
Dimanche 31 juillet 22h50 - Le collectionneur, encore une histoire de serial killer, mais qui ne casse pas trois pattes à un canard. Réalisé en 1997 par Gary Fleder avec Morgan Freeman et Ashley Judd
Lundi 1er sur France 2 à 14h45, le retour de Nestor Burma avec les anciens épisodes (les meilleurs), et c'est tous les jours si vous êtes en vacances et qu'il pleut dehors !
Mardi 2 à 20h40 sur NT1, pour rigoler un peu : OSS 117 Banco à Bangkok de André Hunebelle avec Kerwin Matthews et ...Robert Hossein (1964) Une vraie kitscherie comme on les aime, avec le beau Robert Hossein dans un rôle de méchant à l'ancienne : le savant fou !
Mardi 2 20h40 sur W9 Un "must" pour amateurs de comédies policières à la française : Le cave se rebiffe, de Gilles Grangier (1961) avec Jean Gabin, Bernard Blier et Maurice Biraud
Jeudi 4 à 20h40 sur Arte : Obligatoire, l'épisode pilote de la série anglaise réalisée d'après les truculents romans d'Alexander McCall Smith L'Agence n°1 des Dames détectives, où l'on assiste à la création de l'agence détective de ces dames du Bostwana, sous la direction de l'énergique Mma Ramotswe !
Jeudi 4 à 20h35 sur France 2, si vous êtes absolument fan de James Bond, vous pouvez aussi vous offrir Goldeneye, sorti en 1995 avec Pierce Brosnan.

Réservé aux amateurs de polars riches !

La vénérable Smithsonian Institution de Washington organise toute une série de voyages thématiques, parmi lesquels un British Mystery Tour qui emmènera ses heureux passagers pendant 9 jours de York à Edimbourg, sur les traces des plus célèbres auteurs de romans policiers anglais. Au programme, rencontres avec des auteurs (Ann Cleeves, Ian Rankin et d'autres), visites de lieux célèbres liés à certains personnages précurseurs du roman noir (Jane Eyre, Dracula, Dr Jekyll et Mr Hyde), etc. Tout cela pour la modique somme de... $5995 (voyage compris à partir des Etats-Unis, quand même !). Si vous avez gagné au loto, rendez-vous sur le site. Même par curiosité, ça vaut le coup d’œil !

25 juillet 2011

La CWA Dagger internationale 2011 attribuée à...

Three Seconds de Anders Roslund et Börge Hellström.
Les auteurs suédois de La Bête, thriller glaçant sur fond de pédophilie paru aux Presses de la Cité en 2009, proposent avec Three Seconds un nouveau roman ayant pour thèmes trafic de drogue et corruption. et dans lequel on rencontre un nouveau personnage : l'agent infiltré Piet Hoffmann. 

24 juillet 2011

Thierry Crifo et "La Ballade de Kouski" : grand vent noir de nostalgie

Je viens de faire la connaissance de Thierry Crifo. Il faut dire, à ma décharge, que l'homme déroute : on le croit romancier, il est scénariste pour la télé, ou alors parolier, et pourquoi pas dramaturge. La ballade de Kouski est un roman noir, nostalgique et générationnel. Il parlera tout de suite à ceux qui sont nés entre 1950 et 1960, et il leur dira des choses mélancoliques, violentes, des histoires d'illusions perdues, de destins foirés, d'amitiés égarées. Un roman qui porte en exergue "I'm not like everybody else", cette inimitable chanson écrite en 1966 par Ray Davies pour les Kinks, ne peut pas être un mauvais roman...  C'est un roman qui fait mouche, droit au cœur...
Le narrateur est un ex-champion de hockey d'origine finlandaise, on le cueille au début du roman à Grenoble, où il possède un petit hôtel et un bistrot. La ville de Grenoble en prend plein la tête, dès la première page : "Le Vieux Grenoble défile sous mes yeux avec l'Isère aussi verdâtre qu'un cimetière oublié. Décidément, je ne peux plus sacquer cette ville. Elle me colle, me prend mais je ne dis rien, je reste et je me cache." Le décor est planté. Kouski traîne la patte, il le doit à un accident de travail, comme on dit... et il roule en Panhard, ce qui n'est pas commun. C'est calme, il retrouve son entourage habituel, la gérante de son bistrot et les piliers qui vont avec... Mais ça ne dure pas, puisque fait irruption dans sa vie la femme d'un vieil ami, un frère, le beau Victor Serpolette, avec lequel Kouski s'est définitivement engueulé quelques années auparavant. Sandra Serpolette n'est plus ce qu'elle était : belle plante vénéneuse, elle est devenue maigre, laide et surtout complètement barrée. Victor a disparu... Trois mots qui vont mettre en branle une quête infernale où le pire n'est jamais sûr. Kouski est un homme de cœur : il n'y a qu'une chose à faire, retrouver Victor, et aussi le petit Fred, le fils du couple. Et ce n'est pas à Grenoble que ça se passe, mais à Paris. Commence une course poursuite en forme de dérive avec des vérités pas toujours bonnes à savoir, et le déroulement implacable d'une histoire moche qui débouche sur un drame pratiquement inévitable et sur une fin tragique.
La ballade de Kouski n'est pas un polar. Clairement, Thierry Crifo n'a pas envie de valoriser la police dans cette histoire. Les seuls flics qu'on verra ne tiennent pas le beau rôle. La ballade de Kouski est un vrai roman noir. D'abord parce qu'il s'y déroule des destins tristes à pleurer, des déchéances qui font mal, des petites et des grandes trahisons. Ensuite parce que ceux qui sont nés dans ces années-là et qui n'ont pas toujours choisi le "droit chemin" ne sont pas tous devenus des publicitaires et des communicants florissants. Beaucoup ont cru à des valeurs et à des modes de vie systématiquement battus en brèche par le sens de l'histoire. Et ceux-là ont dégusté, pour de bon... C'est aussi l'histoire triste de ces gens-là que raconte la Ballade de Kouski. Une ballade tout en musique, ce qui n'est pas son moindre charme.

Du coup, on peut se concocter la BO du roman, comme on a pu le faire avec ceux de Ian Rankin ou de Jean-Claude Izzo. On essaye ? David Bowie, les Who, les Stones, les Sex Pistols, les Clash, les Pretty Things, Bruce Springsteen, ZZ Top, les Seeds, Johnny Thunders, les Shadows of Knight, Steppenwolf, Donovan, Jimi Hendrix, Van Morrison, les Small Faces, Françoise Hardy, MC5, Barbara, les Beatles, les Kinks

Thierry Crifo, La ballade de Kouski, Folio policier

Un James Bond vintage :" Au service secret de sa majesté" ce soir sur France 4

En 1969, c'est George Lazenby qui incarne 007. Vous ne vous rappelez pas ? C'est le moment de vous rafraîchir les idées avec "Au service secret de sa majesté", une très bonne cuvée au cours de laquelle on assiste au mariage de James Bond avec... Diana Rigg (oui, Mme Peel), et à une mémorable scène d'action avec hélicoptère. C'est ce soir sur France 4, à 20h35 !

Et puis pendant qu'on y est, offrez-vous le plaisir rare d'écouter Raymond Chandler interviewé par... Ian Fleming (un grand moment de radio) et de lire notre traduction au format pdf.

22 juillet 2011

La Dagger in the Library 2011 décernée par la CWA à Mo Hayder

La Crime Writers Association anglaise vient de décerner son prix "Dagger in the Library" 2011 à Mo Hayder. D'après les jurés, "ses romans torturés, durs, exercent sur le lecteur une attraction émotionnelle obsédante (...) Le couple Jack Caffery, l'enquêteur en souffrance et Flea Marley, la plongeuse de la police, sont une des réussites du genre et chaque roman éveille chez ses fans le besoin d'en lire un autre."
Cinq autres auteurs étaient nominés pour ce prix : Philip Kerr, RJ Ellory, SJ Bolton, Jason Goodwin et Susan Hill.
Les auteurs sont sélectionnés par des bibliothèques et des groupes de lecteurs. Le jury est composé de bibliothécaires travaillant avec le public et récompense un auteur pour l'ensemble de son œuvre.

Un crime, un vrai ! L'abominable histoire des soeurs Papin

Aujourd'hui, Jean Lebrun, dans son émission La marche de l'histoire, recevait Frédéric Chauvaud, auteur de L'effroyable crime des sœurs Papin (Larousse). Une bonne mise en perspective historique, puisque c'est l'angle de l'émission, de l'épouvantable fait divers qui a fait les cauchemars des habitants du Mans en 1933 et inspiré deux films : La Cérémonie, de Claude Chabrol et Les blessures assassines, de Jean-Pierre Denis. En illustration sonore, une chanson peu connue de Georges Brassens, L'assassinat, qui vaut la peine d'être redécouverte et qui commence comme ça :
C'est pas seulement à Paris
Que le crime fleurit
Nous, au village, aussi, l'on a
De beaux assassinats

Réécoutez l'émission, c'est passionnant.

Lee Child remporte le prix "Crime Novel of the Year"

C'est Lee Child qui a finalement remporté le prix  Theakston Old Peculiar Crime Novel of the Year pour son roman 61 Hours ! On est contents pour lui.

21 juillet 2011

Tommaso Pincio : "Cinacitta", Rome sous la canicule chinoise

Il y a quelque temps, je vous racontais ma rencontre avec Tommaso Pincio à l'occasion d'une soirée romaine organisée par les éditions Asphalte et la librairie Longtemps. Il était bien temps que je vous parle du roman ! Et en plus, Tommaso Pincio a eu la gentillesse de répondre à quelques questions supplémentaires. Le bonheur, quoi !

Ce roman n'est pas un polar à proprement parler. C'est une confession, une fable, une parabole, de la fiction, un conte politique... Oui, tout cela pour le prix d'un roman, une affaire, je vous dis ! Trève de plaisanterie, j'ai lu Cinacitta il y a quinze jours, il m'a fallu tout ce temps pour en faire la chronique... Heureusement que je vous avais déjà appâtés, lecteurs et lectrices chéri(e)s, avec l'interview de l'auteur!

Le pitch ? Il fait chaud, ça se passe à Rome. Très chaud même, puisque pratiquement tous les Romains ont émigré vers le nord depuis la fameuse année sans hiver, et la Ville éternelle est maintenant presque uniquement peuplée de Chinois... Le narrateur, que nous appellerons Marcello puisque c'est le prénom que M. Wong, un ami qui ne lui veut pas que du bien, lui a attribué en souvenir de La dolce vita. Parlons-en, de la dolce vita... Elle est bien loin, puisque le narrateur, au moment où il vous écrit, est en prison, condamné pour le meurtre d'une jeune Chinoise. Le pire, c'est qu'on n'a pas l'impression que ça le traumatise plus que ça...

Confession donc, mais qui, comme toutes les confessions sûrement, oublie le principal. Marcello donc, ancien employé d'une galerie d'art contemporain ultra-branchée, ne suit pas le mouvement au moment où tout son entourage décide de quitter Rome, devenue insupportable sous la chaleur. Il reste dans son minable studio, accroché à son ordinateur, nourrissant l'espoir de terminer un jour, peut-être, une BD qu'il a commencée des années auparavant, en des temps bien différents, cultivant sa fascination pour le porno japonais. Pourquoi reste-t-il ? Lui-même ne le sait pas très bien. Il se détache petit à petit de tout ce qui pouvait le relier à son ancienne vie - famille, amis... L'invasion chinoise a commencé, et elle a complètement bouleversé le mode de vie de la ville. Est-ce ce nouveau monde qui l'attire irrésistiblement ? Un monde étrange, où l'on vit la nuit, puisque dès 10h00 du matin il fait 50°. Un monde où les rapports entre les humains a radicalement changé. Un monde où Marcello passe ses nuits dans une boîte à putes sordide, à contempler les jeux dérisoires des filles et de leurs clients. Car il n'y participe même pas... Les femmes semblent lui être devenues indifférentes, et le fantasme suffit apparemment à satisfaire le peu de libido qui lui reste. Saura-t-on ce qui, dans son passé, a bien pu provoquer une telle lassitude ? Jusqu'au jour où il rencontre M. Wong, qui observe son manège depuis un moment déjà, et qui lui propose une aubaine du genre qu'on ne refuse pas. Troquer son minuscule studio contre une suite à l'hôtel Métropole, ancien établissement de luxe romain. Pourquoi cette proposition ? Marcello ne cherche pas à savoir, il accepte. En échange, il passera désormais ses nuits à jouer au billard avec M. Wong, en la présence muette de la très jolie et très nue Yin, la fille aux bottes rouges qui les abreuve en bière fraîche. C'est vrai, l'hôtel Métropole n'est plus ce qu'il était. Il est à l'image de la ville, pas entretenu, vieillissant, pourrissant presque... De décadence en décadence, Marcello touche le fond. Mais le pire n'est jamais sûr...

Ce livre est intrigant. On le termine, puis on y revient, de peur d'avoir raté quelque chose. Les références culturelles et politiques y sont nombreuses, mais jamais ostentatoires. L'écriture est sobre, mais d'une sobriété qui accroche, qui retient. Pincio donne de Rome un portrait effrayant, une vision totalement décadente, quasiment morbide qui surprendra sûrement les touristes... et les Romains eux-mêmes. A vrai dire, dès le début du roman, on pense à la Métamorphose de Kafka. Ce qui est en train de se produire dans ce roman est absolument terrifiant, et pourtant il n'y a pas de révolte chez le narrateur, plutôt une sorte de résignation lucide et ironique. Un livre fascinant, qui appuie là où ça fait mal, qui n'hésite pas à mettre à nu nos plus immondes préjugés raciaux et culturels. Un conseil de lecture enthousiaste, mais attention, vous risquez de n'être plus tout à fait le même après avoir terminé ce livre.

Questions et réponses


LBdP : Après avoir lu les premières pages de Cinacitta, j'ai immédiatement pensé à La Métamorphose de Kafka. Cet auteur vous a-t-il influencé ?
TP : Avec Dostoïevski, Kafka est un des auteurs que je vénère. A chaque fois que je travaille à un roman, je le relis. Pour moi, c'est comme de la méditation transcendantale. En fait, c'est Crime et châtiment qui m'a inspiré Cinacitta. A mon avis, si vous avez ressenti cette impression kafkaïenne, c'est parce que je m'efforce d'imiter - sans succès, je le crains - sa prose simple mais si personnelle.

LBdP : A votre avis, comment les Chinois vont-ils réagir à votre livre ? Car il faut avoir un sacré sens de l'humour et de la distance, dans la mesure où votre narrateur décrit les Chinois et leur mode de vie de façon plutôt insolente !
TP : J'ai des amis chinois, et aucun n'a protesté. Ce qui ne signifie pas qu'ils aient apprécié les descriptions dont vous parlez, mais les Chinois ont tendance à esquiver les conflits, sauf s'ils sont absolument inévitables. Donc je suppose qu'ils se sont dit : "Pourquoi m'en faire ? Après tout, au bout du compte, ça n'est qu'un roman." Et puisque les Chinois sont loin d'être stupides, peut-être se sont-ils dit que mon personnage dit aussi des horreurs sur Rome et les Romains. En fait il dit des horreurs sur tout, sauf sur ce qu'il fait et sur lui-même, ce qui est typiquement italien, à mon avis.


LBdP : Pensez-vous que la situation politique en Italie (et ailleurs) a atteint un stade tellement terrible qu'elle vous a inspiré ce qu'on peut percevoir comme une charge redoutable?
TP : Au moment où j'écrivais le roman, l'Italie découvrait un des pires aspects de l'ère berlusconienne, et ce n'était pas Berlusconi lui-même mais les raisons pour lesquelles tant d'Italiens ont choisi d'être représentés par lui.. D'un côté, on assiste à une aggravation terrible de la paresse morale ; les gens ont perdu toute capacité à s'indigner. Tout leur semble acceptable, ou du moins justifiable. De l'autre, il y a un fort sentiment d'incertitude et, en conséquence, des peurs irrationnelles qui ont dégénéré vers une forme de racisme; quand on ne se sent pas en sécurité, qu'on a peur de l'inconnu - l'avenir par exemple - on se met à soupçonner les personnes qu'on ne connaît pas - les immigrés par exemple. A ce stade, il devient facile de se persuader que ce sont les immigrés qui nous volent notre avenir. Mais ça n'était qu'un aspect des choses. A plus grande échelle, je voulais représenter notre pessimisme vis-à-vis du monde occidental en général, que ce soit sur le plan économique ou culturel. En fait, l'idée que l'Europe arpente une sorte de Sunset Boulevard n'est pas neuve. Quand il écrivait son Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, Edward Gibbon mettait déjà en garde les Européens contre la perte des vertus civiques. Dans cette perspective, Rome devient un lieu métaphorique. Je pense qu'en réalité la fascination du mythe romain ne réside pas dans l'incroyable montée en puissance de son Empire, mais dans sa décadence. 

LBdP : Y a-t-il un événement particulier qui vous a inspiré l'histoire de Cinacitta ?
TP : Je ne crois pas. A la base, l'intrigue est une pure fiction, mais certaines anecdotes marginales du roman viennent de faits réels. Et puis tous les personnages italiens reflètent des personnes réelles, même si elles sont déformées. Mais mon objectif n'était pas de représenter la réalité. Je voulais créer une situation imaginaire qui fonctionnerait comme un souvenir onirique du monde où nous vivons.

LBdP : Quelles ont été les réactions en Italie après la publication de Cinacitta ?
TP : Variées. En termes de critiques, le roman a été traité de façon plutôt positive. Les gens ont des réactions différentes. Ce qui m'a intéressé, c'est que beaucoup de personnes ne l'ont pas lu comme une fiction. Elles  pensent que les opinions et les pensées du protagoniste sont un reflet de mes opinions et de mes pensées. C'est étrange : en général, les gens ne pensent pas que Dostoïevski approuve ce que fait Raskolnikov - par exemple. Et pourtant, c'est ce qui m'est arrivé avec les lecteurs romains.

Cinacitta, de Tommaso Pincio - traduit de l'italien par Sarah Guilmault - Asphalte éditions

Furia à Bahia pour OSS 117 ce soir sur NT1

Amateurs de curiosités des années 60, ruez-vous sur NT1 pour y voir une rareté kitsch avec Frederick Stafford et la blondissime Mylène Demongeot, Furia à Bahia pour OSS 117, chef-d'oeuvre d'André Hunebelle. Les amateurs se rappelleront sûrement l'article que nous avions consacré à ce héros sixties. Et puis après ça, redevenez intello et regardez donc la merveille de Francesco Rosi, Cadavres exquis à 23h45 sur France 3. Bonne soirée.

Ce soir, un des plus célèbres prix de littérature policière attribué à Harrogate

Ce prix très apprécié chez nos amis de l'autre côté du Channel est le clou d'un grand festival consacré à la littérature policière. Cette année, on pourra y voir (et y écouter) entre autres Dennis Lehane, Lee Child, David Baldacci...
Les nominés pour le  Theakstons Old Peculier Crime Novel 2011 :
From The Dead de Mark Billingham
Blood Harvest de SJ Bolton
61 Hours de Lee Child
Dark Blood de Stuart MacBride
The Holy Thief de William Ryan
The Anatomy of Ghosts deAndrew Taylor 
 Le prix sera décerné ce soir.. suspense ! une chose est sûre, PD James sera honorée pour l'ensemble de son oeuvre.
L'année dernière, c'est RJ Ellory qui avait été récompensé pour Les Anonymes. Il a été précédé par Mark Billingham, Val McDermid, Alan Guthrie et Stef Penney

20 juillet 2011

RJ Ellory en piste pour la "Dagger in the Library", décernée par la CWA

Le prix "Dagger in the Library" est l'un des plus prestigieux sur le plan international. Cette année encore, il récompensera un auteur de littérature policière pour l'ensemble de son oeuvre.

Sont en compétition cette année :

SJ Bolton, RJ Ellory, Jason Goodwin, Mo Hayder, Susan Hill, Philip Kerr

Résultats vendredi 22 juillet ! En attendant, croisez les doigts, quel que soit votre favori !

La Crime Writers Association décerne son prix du roman étranger vendredi 22 juillet

La très célèbre et très respectable CWA anglaise (Crime Writers Association) désignera son lauréat, catégorie roman étranger, vendredi 22 juillet. Qui remportera la convoitée "dagger"  cette année? Les paris sont ouverts, voici les finalistes :
The Wings of the Sphinx d'Andrea Camilleri
Needle in a Haystack d'Ernesto Mallo
The Saint-Florentin Murders de Jean-François Parot
Three Seconds de Anders Roslund & Börge Hellström
River of Shadows de Valerio Varesi
An Uncertain Place de Fred Vargas
Death on a Galician Shore de Domingo Villar
 Rappelons que le prix est déjà allé trois fois à Fred Vargas et une fois à Dominique Manotti.

19 juillet 2011

"Les Anonymes" de RJ Ellory, dit par Charles Borg, une voix pas anonyme !

Il y a quelques semaines, nous chroniquions la version audiolivre des Anonymes, de RJ Ellory (chronique à lire ici). L’écoute de cet enregistrement, particulièrement réussi car en pleine harmonie avec le roman, nous a donné envie d’en savoir plus. Charles Borg, qui a prêté sa voix à cette lecture, a répondu à nos questions.

LBdP : Comment s'effectue le choix du comédien qui va lire le roman ?
Ch. B. : J’ai été choisi sur essai. On m’a fait enregistrer un petit extrait du roman et, quelques jours plus tard, on m’a dit que j’étais engagé.

LBdP : Avez-vous votre mot à dire sur le choix de l'ouvrage que vous allez lire ?
Ch. B. : Non. Mais, à Audiolib, il n’y a que de bons ouvrages qui sont sélectionnés !

LBdP :  Quelles sont les qualités spécifiques qu'il faut avoir, à votre avis, pour mener à bien ce type de performance ?
Ch. B. : Difficile pour moi de répondre à cette question ! Je crois que la qualité principale qu’il faut avoir, c’est l’amour de la lecture. C’est mon cas.

LBdP : On dit volontiers que pour bien lire un texte, il ne faut pas le "surjouer". Qu'en pensez-vous ?
Ch. B. : Effectivement, ne pas surjouer. Parvenir à une neutralité, une objectivité tout en se sentant très concerné. Quand il s’agit d’un immense et magnifique roman comme « Les Anonymes », on y arrive !

LBdP : Avez-vous lu le livre en entier d'abord avant de l'enregistrer ?
Ch. B. : Ah oui ! Il faut toujours avoir lu le livre en entier, pour savoir « où on va » lors de l’enregistrement.

LBdP : Y-a-t-il plusieurs prises, comme au cinéma, jusqu'à ce que vous soyez satisfait du résultat?
Ch. B. : On ne peut pas parler de « prises » comme au cinéma. Mais quand on accroche sur des mots ou qu’on les prononce mal, on reprend, bien sûr. En général, au début de la phrase.

LBdP : L'écoute des Anonymes dure 21 heures. Combien de temps a duré l'enregistrement ?
Ch. B. : J’ai eu huit séances d’enregistrement. Faisons le compte : 21 divisé par 8 égale 2, 625. Donc, ça fait un peu plus de 2 heures 30 d’enregistrement retenu par jour

LBdP : Travaillez-vous livre en main ou avec un texte défilant sur ordinateur ?
Ch. B. : J’ai travaillé avec le texte tiré sur format A4 (donc autant de pages que le roman, mais « écrit plus gros »).

LBdP : L'enregistrement se fait-il dans un studio spécialisé avec un matériel spécifique ?
Ch. B. : Cela se fait dans un studio d’enregistrement classique. Celui dans lequel j’étais, était particulièrement perfectionné. Mais, vous savez, la qualité technique du résultat, revient en très grande partie au travail de l’ingénieur du son !

LBdP :  Avez-vous eu un contact avec l'auteur, le traducteur ou l'éditeur du livre pour établir une sorte de "cahier des charges" préalable ?
Ch. B. : Je n’ai eu de contact qu’avec Mme Liza Szpeker d’Audiolib et M. Malek Duchêne, ingénieur du son.

LBdP : Qui décide de la "mise en son" : traitement spécique des passages en italique, etc.
Ch. B. : La mise en son, l’habillage sonore, etc, tout cela c’est le travail de l’ingénieur du son.

LBdP : La lecture d'audio-livres ressemble-t-elle un peu au métier de doublage ?
Ch. B. : Dans le doublage, on joue, on interprète un rôle ; et on doit dire son texte dans un laps de temps bien précis. Cela n’a rien à voir avec une lecture. Par contre, c’est plus proche de ce que j’ai connu en radio. En particulier, les lectures de textes à France Culture.

LBdP : Qu'avez-vous tiré de cette expérience pour votre métier d'acteur ?
Ch. B. : J’ai éprouvé, bien sûr, une joie énorme à faire ce travail. En plus, grâce à cela, j’ai découvert un grand auteur, R.J. Ellory. J’ai commencé à lire ses précédents polars…

Les Anonymes, de RJ Ellory, traduit par Clément Baude,texte dit par Charles Borg, Audiolib

Charles Borg
Théâtre, cinéma, télévision
Après une carrière au théâtre (Le rendez-vous de Senlis d’Anouilh en 1984, le Récital Prévert en 1986, Tout est comédie en 1989, Amphitryon de Molière en 1990), il se dirige vers la télévision (de Lunes de miel en 1990 à La vie devant soi de Myriam Boyer en 2010) et le cinéma en jouant dans Les Apprentis de Pierre Salvadori, dans L’Anglaise et le Duc d’Eric Rohmer (2001). En synchro, il a doublé Rob Lowe dans One hell of a guy, Jack Nicholson dans La petite boutique des horreurs  pour sa sortie en DVD (2005). Il a été la voix française du docteur Dubenko de la série  Urgences de 2005 à 2009.
Réalisation
En 2000, il réalise un court-métrage : Performant, dans lequel il joue le rôle principal. Ce court métrage a été projeté dans plusieurs festivals. Il travaille actuellement sur un long métrage.
Musique
Egalement chanteur et musicien, Charles Borg a monté plusieurs one man shows. Son spectacle A la vie, à l’amore est un hommage au chanteur Herbert Pagani, décédé en 1988 d’une leucémie foudroyante. En juin 2008, il a donné un récital exceptionnel à la SACD. Ce spectacle a également été joué en novembre 2009 au Ciné 13 Théâtre, puis repris en juin 2011 à l’Essaïon Théâtre.

17 juillet 2011

Portes ouvertes sur Ian Rankin... Enfin !

Depuis Exit Music, le dernier épisode de la saga John Rebus paru en français en 2010, ses fans désespéraient de lire le roman suivant de leur auteur préféré, l'inimitable Ian rankin. Ils pourront respirer en septembre, puisque les éditions du Masque publieront Portes ouvertes.

Moment difficile pour un auteur quand il faut mettre fin à une série mondialement célèbre et "tuer" un personnage devenu un véritable mythe dans l'univers en expansion perpétuelle des amateurs de polars. Il fallait pourtant bien se jeter à l'eau... C'est ce qu'a fait Ian Rankin avec ce roman qu'on ne peut pas s'empêcher de percevoir comme une œuvre de transition mais aussi de renouveau. En effet, on change d'univers avec Portes ouvertes. Rebus nous avait entraînés à sa suite dans les quartiers les plus glauques et les intrigues les plus sombres d'Edimbourg. Avec Portes ouvertes, on reste à Edimbourg certes, mais d'une part on n'est plus du côté des "bons" - la police et plus particulièrement John Rebus -, mais avec les méchants en puissance. Et cela passe dans les milieux du marché de l'art, où en principe on se tient bien... Changement radical donc : en démarrant la lecture, les choses sont claires. Avec Exit Music, Rankin avait offert à son personnage un superbe baroud d'honneur. Le roman était un véritable concentré de tout ce qui a fait de Rebus ce qu'il est : un personnage sombre, ambigu, solitaire, grand amateur de rock, de bière et de whisky, rebelle et pratiquement invivable. Dans Portes ouvertes, on a la sensation que Rankin a voulu s'éloigner délibérément de ce héros qui était sans doute son "moi" sombre pour laisser davantage de place à son autre facette : celle d'un narrateur hors pair. Les trois hommes qui servent de héros à cette aventure pas banale sont des personnages comme on a peu l'habitude d'en voir chez Rankin : un conseiller financier las de sa vie professionnelle, un créateur de start up plein aux as, mais qui s'ennuie un peu, et un professeur spécialiste en histoire de l'art. Ces trois-là, chacun pour une motivation différente, vont décider de faire le grand saut et d'échafauder un "coup fumant" : débarrasser les entrepôts pleins à craquer de la National Gallery d'Edimbourg de leur excédent... "Aider ces malheureux tableaux emprisonnés à s'évader." Parler, mitonner des plans imparables, c'est une chose. Passer à l'acte, c'en est une autre. Le trio a besoin de main d’œuvre "professionnelle"... Et bien sûr, c'est là que ça se gâte, c'est le moins qu'on puisse dire.

On retrouve avec Portes ouvertes un Ian Rankin lumineux, un virtuose de l'énigme bien ficelée, une écriture libre, facétieuse, beaucoup d'allusions, y compris à l'inspecteur Rebus, que le flic en charge de l'affaire, Ransome, évoque en une pirouette. De l'humour, de l'énergie, du mouvement et de l'action, en particulier à la fin où les événements se précipitent sérieusement... Evidemment, les amoureux de Rebus ne pourront pas s'empêcher de se sentir un peu orphelins, surtout face à Ransome, un flic avec qui on n'a pas vraiment envie de boire une bière à l'Oxford Bar. Mais les fans de Rankin ne pourront que se réjouir que leur auteur préféré ait su rebondir aussi brillamment. Et ça n'est que le début...


Dans cette interview, Ian Rankin explique qu'au départ, Portes ouvertes a été publié par épisodes dans le New York Times, qui avait démarré une série de feuilletons écrits par des maîtres comme Connelly ou Cornwell. Il s'explique aussi sur son titre : les trois comparses décident de profiter de la journée portes ouvertes annuelle des réserves des musées d'Edimbourg, seule journée au cours de laquelle le public a accès à toutes les collections qui y sont conservées, pour commettre leur forfait. Il avoue également que le personnage de Mike, le responsable de startup devenu riche plus ou moins par hasard, est un peu son porte-parole. Tout comme Mike, Ian Rankin s'intéresse à l'art et fréquente volontiers les ventes aux enchères.

Portes ouvertes, de Ian Rankin - éditions du Masque - Traduit de l’anglais (Ecosse) par Stéphane Carn.

16 juillet 2011

Devoirs de vacances pour polarophile ensablé

Didier Daeninckx l'écrivain et Tardi l'auteur de BD, vous connaissez certainement. Mais lorsque les deux s'associent pour réaliser La der des ders, et que les éditeurs Magnard et Casterman se joignent au projet, on obtient un petit livre sympa composé de la BD originale en noir et blanc à laquelle 26 pages de documents complémentaires ont été très astucieusement ajoutées. Du coup, cette petite collection destinée au collège, lycée général et professsionnel à un côté "devoir de vacances" plutôt agréable comparé aux habituels cahiers de mise à niveau. Par exemple, on vous propose des questions à partir des planches de la BD, des interviews des auteurs, des bibliographies, filmographies, un lexique et une mise en perspective historique. Tout ceci pour vous donner l'occasion non seulement de lire une BD particulièrement réussie, mais aussi de réaliser un petit travail avec vos enfants en utilisant les exercices proposés, qui n'ont rien de rébarbatif. Rappelons que La der des ders est à l'origine un roman de Didier Daeninckx qui utilise le prétexte d'une enquête sur un adultère pour évoquer les mutineries de 1917, les trafics des stocks américains d'après-guerre et même les occupations d'immeubles par des anarchistes et des ouvriers en colère. Le dessinateur Tardi suit à la ligne près le roman qui peut se lire dès que l'on a abordé l'histoire de la première guerre mondiale à l'école.

Les jeux de l'été : Atmosphère, atmosphère !

Voici 5 photos d'ambiance à l'heure du thé ou du café. A qui vous font-elles penser ?

Cliquez sur la photo de votre choix et vous aurez la réponse, avec quelques explications.











Alors, vous avez déjà une idée des réponses ?

Les vacances de Monsieur Bond

Le Blog du polar pense à vous avec une sélection de livres, de films et de séries télé pour rester dans l'ambiance pendant vos vacances.

Commençons avec votre programme "télé polar" du dimanche. Oubliez la crème solaire écran total et enfilez votre gilet en Kevlar pour une soirée James Bond le 17 juillet à partir de 20h35 sur France 4. Deux films avec Sean Connery; curieusement proposés dans le désordre. Le premier, On ne vit que deux fois, est en fait le cinquième de la série. L'agent secret part pour le Japon où il va expérimenter les talents des autochtones du sexe faible et un curieux hélicoptère ultra-léger qui tire dans les coins. Un film très sympa qui se laisse regarder sans toutefois avoir le chic et le style de Bons baisers de Russie, le deuxième de la série qui est une référence pour les amateurs du genre et qui en fait de Russie se passe essentiellement à Istanbul. Les cinéphiles resteront scotchés à partir de 22h30 devant leur écran géant lors de la scène de la bataille (presque finale) dans le train, qui est un morceau d'anthologie digne de Hitchcock, avec un nombre de plans inimaginable pour un corps à corps entre Robert Shaw et Sean Connery.

Lundi 18, sur France 2, ne ratez pas A History of Violence, beau thriller de David Cronenberg avec le sexy Viggo Mortensen. Certes pas un des plus spectaculaires de Cronenberg, ce film d'une troublante ambiguïté en dit long sur l'Amérique profonde... et sur la violence.

Mardi 19, sur Arte, vous avez intérêt à être du genre insomniaque car c'est à 1h35 du matin que vous pourrez voir Scènes de crime, de Frédéric Schoendorffer, avec Berling et Dussolier, un polar à la fois réaliste sur les rapports entre un vieux flic alcoolique et son jeune partenaire, et limite hard core sur la fin... Pour vous préparer à voir dans les salles le nouveau Schoendorffer, avec Eric Cantona, Switch, si vous ne l'avez pas encore fait.

Mercredi 20, sur France 2 à 13h55, une curiosité signée Barbet Schroeder, Inju, la bête dans l'ombre, sorte d'hommage aux polars japonais où Benoît Magimel incarne un auteur de polar victime d'une épouvantable manipulation.

Jeudi 21, retour aux classiques avec le Cadavres exquis de Francesco Rosi, avec Lino Ventura. Un beau thriller très politique comme d'habitude avec Rosi, avec assassinats de magistrats, corruption et tragédie. Ca se passe à 23h45 sur France 3.

Vendredi 22, ceux d'entre vous qui auraient raté la première diffusion du Sherlock Holmes new look incarné par Benedict Cumberbatch, une version moderne où SMS, internet et GPS tiennent un rôle important, mais néanmoins fidèle dans l'esprit au Sherlock d'origine, ne manquez pas celle-là. Fantaisie et humour décalé des plus délicieux. Rendez-vous à 20h35 sur France 2.

12 juillet 2011

Les éditions Asphalte : de l’urbain, de la contre-culture, du voyage

Asphalte est une maison d’édition fondée fin 2009 par Estelle Durand et Claire Duvivier. Les deux jeunes femmes avaient connu plusieurs expériences dans l’édition avant de se lancer dans l’aventure. Une idée précise de ce qu’elles voulaient – de l’urbain, de la contre-culture, du voyage – un savoir-faire certain, une belle énergie, une créativité féconde  : deux ans plus tard, Asphalte propose déjà un catalogue très singulier de quatre collections et près de 20 ouvrages. Estelle Durand a bien voulu répondre à nos questions.

LBdP : Fonder une maison d'édition en 2009, en pleine crise financière, à un moment où l'édition ne va pas très bien, c'est audacieux. Pouvez-vous me raconter l'histoire de cette naissance ?
ED et CD : Vous n’êtes pas la première à nous faire cette remarque ! Nous avons évidemment bien étudié la question avant de nous lancer, ainsi que le marché du livre.
Le principe de base, c’est bien sûr une gestion des coûts serrée – une maison d’édition est avant tout une entreprise, il faut sans cesse avoir les pieds sur terre et créer à partir de ses moyens. – mais aussi une identité claire pour se faire une place et se démarquer. Crise ou pas crise vous me direz, mais c’est d’autant plus important en temps de crise. Je pense qu’il y a de la place pour tous à partir du moment où chacun garde son image, son identité, son esprit. La maison est née en juillet 2009 sur le papier, mais les premiers titres sont sortis en mai 2010. Le temps de trouver les précieux premiers titres, de trouver un non moins précieux diffuseur-distributeur et de tout préparer au chaud avant le jour J !

LBdP : Vos choix éditoriaux sont clairs, on les trouve dès la page d'accueil de votre site: littérature urbaine, contre-culture, voyage. Ces choix reflètent-ils vos centres d'intérêt antérieurs ? Ont-ils évolué avec le temps ou êtes vous restées fidèles à vos options d'origine ?
ED et CD  : Ces trois axes, ingrédients comme on aime à le dire, correspondent à des univers qu’on apprécie chacune. Mais tout est cohérent : qui dit voyage dit route, qui dit route dit Kerouac, lequel appelle la contre-culture et toutes les formes qu’elle a pu prendre au cours du siècle. Et qui dit route dit forcément ville, dans toutes ses géographies possibles, bien ancrées dans le réel ou complètement fantasmées. Le nom Asphalte recouvre toutes ces directions, cet esprit que l’on voulait insuffler à la maison et à son catalogue.
Comme je le disais, il est important de rester fidèle à ses choix, ne pas s’éparpiller tout en se renouvelant. Aucun titre Asphalte ne se ressemble. Nous restons donc sur la même ligne, on garde le cap, c’est essentiel pour ne pas dériver !
Les évolutions se trouvent dans les manières de traiter tel ou tel aspect de notre ligne. Nous faisons certes de la littérature urbaine, mais il serait réducteur de penser qu’il s’agit exclusivement de textes contemporains mettant en scène la banlieue. Les Eaux-fortes de Buenos Aires, par exemple, sont des chroniques écrites dans les années 1930 par Roberto Arlt, pionnier de cette littérature en Argentine. Ce n’est pas ce à quoi on songe de suite en entendant parler de « littérature urbaine », pourtant ça en fait partie. Le fait de publier des auteurs d’horizons divers contribue aussi à élargir ce que l’on entend par contre-culture et voyage. Les hippies de Chiens fous, roman thaï paru en janvier dernier, ne sont pas les hippies de San Francisco !

LBdP : Que pensez-vous de la pléthore de publications et de nouvelles collections qui caractérise le genre polar/noir ? Votre collection « Asphalte Noir » est à la fois dans l'air du temps et singulière puisqu'elle publie des nouvelles, genre réputé difficile à vendre en France.
ED et CD  : Avec la collection « Asphalte Noir », il ne s’agissait pas d’être dans l’air du temps ! C’est juste le fruit d’un beau hasard qui nous a fait découvrir cette belle collection chez un éditeur indépendant de Brooklyn, avec lequel nous avons trouvé une certaine communauté d’esprit.
Il s’agit certes de nouvelles, mais portées par le concept « une ville, une anthologie ». Ces nouvelles sont idéales pour plonger successivement dans les atmosphères des quartiers décrits et permettent une lecture fragmentée, laquelle correspond bien aux modes de lecture que l’on a par exemple en voyage.
Nous ne voulions pas nous arrêter devant l’idée reçue selon laquelle les Français ne lisent pas de nouvelles. Si le thème est bien choisi, si le livre est attrayant, si l’on peut aller plus loin (grâce notamment à nos playlists Asphalte, aux cartes interactives sur le blog, mais aussi aux visuels plutôt colorés des livres), on peut dépasser ce blocage et créer un « effet collection » qui donne envie d’acheter le volume sur Rome si on a apprécié celui sur Londres par exemple.


LBdP : Pour rester avec cette collection, comment choisissez-vous vos textes ? Quelle "feuille de route" donnez-vous à vos éditeurs ?
ED et CD  : Ces anthologies noires et urbaines correspondaient exactement à ce qu’on avait envie notamment de publier : des sortes de guides alternatifs de voyage, par la fiction (noire dans ce cas). La collection américaine compte à ce jour environ une cinquantaine de titres. Le but n’est pas de tous les reprendre mais de les sélectionner soigneusement tant par la ville abordée (certaines sont plus porteuses d’une imaginaire pour les lecteurs français que d’autres) que par la qualité des textes courts réunis.

LbdP : Pour l'instant, la plupart de vos titres sont des traductions. S'agit-il d'un choix ou souhaitez-vous également publier des auteurs francophones ? Avez-vous des difficultés à trouver des manuscrits en français qui correspondent à vos critères ?
ED et CD  : Asphalte est une maison cosmopolite, cela fait partie de son identité depuis le début. Nous ne nous interdisons pas de publier des textes français, au contraire ! Mais c’est vrai que pour le moment, nous n’avons pas lu de manuscrit susceptible de correspondre à l’esprit Asphalte. On persévère, ça va venir !

LBdP : Lorsqu'on parle de littérature urbaine, on pense presque tout de suite roman noir. Pensez-vous qu'il y ait une bonne raison à cela ou bien est-ce que cela ressort du préjugé?
ED et CD  : La littérature urbaine est bien plus vaste que le roman noir. Qui peut dire que les Eaux-fortes sont du roman noir ? De même le roman anglais Pommes est très urbain, très ancré dans la ville de Middlesbrough dans laquelle évoluent des ados paumés montrés sans fard. On n’a pourtant aucun élément du roman noir.

LBdP : Sur votre site Internet, vous réservez une section entière aux traducteurs, ce qui n'est pas fréquent. Comment travaillez-vous avec vos traducteurs, comment les choisissez-vous ?
ED et CD  : Les différents traducteurs avec lesquels on a travaillé ont été rencontrés de multiples façons : recommandations ou encore tout simplement via le site de l’Atlf. Il est arrivé souvent également que des traducteurs viennent nous apporter des projets. Si ces projets se concrétisent, on travaille alors évidemment avec eux, ce sont leurs bébés!
Nous avons à cœur de continuer à travailler avec les mêmes traducteurs, de se constituer en quelque sorte un réseau.

LBdP : Sur votre blog, vous mettez en ligne quelques "play lists". Pensez-vous que parmi les auteurs contemporains, beaucoup sont influencés par des univers musicaux ?
ED et CD  : Énormément, en tout cas les nôtres. Nous nous en sommes très vite rendu compte, à force de demander aux auteurs de nous composer la playlist de leurs livres : ils étaient ravis et comme ils le disaient, ce n’était pas difficile pour eux, car la musique faisait déjà partie de leurs textes, on l’entendait au fil des chapitres. Jazz dans Chat sauvage en chute libre, punk 70s dans Londres Noir, tango dans les Eaux-fortes, rock rageur dans Golgotha

LBdP : Pensez-vous qu'une jeune maison d'édition se doit de "jouer" avec les moyens de communication qui sont à sa disposition : réseaux sociaux, blogs, Twitter...? Si oui, quelle part occupent ces médias dans votre communication ?
ED et CD  : Je ne sais pas si on se « doit » de le faire ; si nous le faisons, c’est naturellement, parce que ce sont les outils de notre génération et que nous communiquons ainsi. S’en faire une obligation, c’est le meilleur moyen de perdre toute spontanéité – et tout plaisir. C’est peut-être pour cela que nous n’avons pas de Twitter – parce que nous ne twittons pas à la base. Mais nous avons un blog, l’Asphalte Café, vu que l’une d’entre nous bloguait avant la création d’Asphalte, et une page Facebook car c’est un outil que nous utilisons déjà dans la vie de tous les jours.
Pour répondre à votre question, oui, les réseaux sociaux et les blogs occupent une bonne place dans notre communication, mais ce n’est pas un calcul de notre part, il s’agit juste d’utiliser des outils avec lesquels nous sommes à l’aise.

LBdP : Que pensez-vous du livre électronique ? Comptez-vous développer une offre de ce type ?
ED et CD  : Nous ne pouvons que vous donner rendez-vous cet automne…

LBdP : Comment voyez-vous l'évolution de votre ligne éditoriale ? Quels sont vos projets importants pour les mois à venir ?
ED et CD  : Une rentrée littéraire irlandaise et délurée : Breakfast on Pluto de Patrick McCabe, une  rencontre avec un sweet transvestite dans le Londres des années 1970, où plane la menace du terrorisme irlandais… Mexico Noir, dirigé par Paco Ignacio Taibo II, une plongée très sombre dans la plus grande mégapole du monde… Et enfin Berazachussetts, un OVNI argentin où l’on croise des zombies et des pingouins. Entre autres.

Pour tout savoir sur le catalogue et l'esprit Asphalte, rendez-vous sur le site.

Prix SNCF du Polar 2012 : c'est parti !

Vous pouvez d'ores et déjà voter pour votre roman d'été préféré, à choisir entre Les visages écrasés, de Marin Ledun, Le jeu du pendu, d'Aline Kiner, Rouge gueule de bois de Léo Henry, Avant d'aller dormir, de Steve J. Watson, Le poète de Gaza, de Yishaï Sarid et Rosa, de Jonathan Rabb. Le gagnant fera partie des trois finalistes. Bien sûr, il faudra aussi choisir votre polar favori pour l'automne et l'hiver ! Petit changement cette année : romans français et étrangers seront intégrés dans une même sélection. Il n'y aura donc qu'un vainqueur. Verdict au printemps 2012.
Rendez-vous sur le site.
Rappelons qu'en 2011, le prix a récompensé L'été tous les chats s'ennuient, de Philippe Georget (Jigal) pour la catégorie romans français, et Le chuchoteur de Donato Carrisi (Calmann-Lévy) pour les romans européens.

François Cérésa : Un roman noir sur l'amour sinon rien !

François Cérésa est surtout connu pour ses déboires judiciaires. Journaliste et romancier, il fut poursuivi par les héritiers de Victor Hugo qui lui reprochaient ses deux livres Cosette, ou le temps des illusions et Marius ou le fugitif, édités par Plon, qui proposaient une suite à l'œuvre originale du grand homme. Ces deux textes étaient d'ailleurs issus d'une commande écrite à l'initiative de l'éditeur Plon.

Pourtant François Cérésa est aussi l'auteur d'une vingtaine de romans dont Les Moustaches de Staline, qui a été récompensé par le prix Cabourg du roman. Il s'est aussi essayé à l'art du polar avec Petit papa Noël, en utilisant comme trame une histoire plus ou moins basée sur les Dix petits nègres. En quelques mots, il s'agit d'un magot en pièces d'or découvert dans la cave d'un immeuble occupé par une dizaine de copropriétaires qui auraient normalement dû se partager le butin. Mais voilà, les disparitions et les meurtres inexpliqués vont rapidement changer la donne. Ce livre est un prétexte pour évoquer les relations entre un quinqua buveur de verres d'huile d'olive et une jeunette qui retrousse volontiers ses jupes pour clore toute contradiction. Le ton est enjoué, parfois un peu lubrique mais toujours savant car cet auteur a des lettres et cela se sent. Il n'hésite pas à comparer protagonistes et situations à des personnages réels ou de fiction entrevus dans des films ou des livres. En plus, né en 1953, il est d'une génération qui a eu la chance de pouvoir mélanger les styles sans limite. C'est un livre qui se lit vite, à peine 180 pages, et qui fait sourire du début à la fin, ce qui n'est pas inutile en ces temps troubles. Peut-être faut-il mettre en garde les lecteurs spécialistes du genre, ceux qui ne supportent pas que l'on rie du « noir » car François Cérésa a bien dû s'amuser à l'écriture de ces pages qui ont le goût et la couleur du polar mais qui sont en réalité une occasion de parler de l'amour, le vrai, l'intransigeant, le destructeur !


François Cérésa – Petit Papa Noël – Pascal Galodé éditeur

11 juillet 2011

Lancement de Noir Nation, e-journal international sur le roman noir

Lancement de Noir Nation, un e-journal international consacré à la littérature policière, dans le cadre de CrimeSpace. CrimeSpace regroupe plus de 3000 auteurs et lecteurs (http://crimespace.ning.com/). Si vous êtes anglophone, n'hésitez pas à les rejoindre.

Voir la bande annonce.

Retour aux sources avec Dashiell Hammett

Il y a des classiques du polar qu'on ne peut s'empêcher de relire chaque fois qu'ils se rappellent à nous. C'est le cas de La clé de verre de Dashiell Hammett, récemment tombée d'une étagère un jour de rangement des polars qui menaçaient d'essaimer dans les rayonnages avant l'arrivée de l'été. C'est dans sa version poche Carré Noir numéro 97 avec une couverture stylisée dessinée aux crayons de couleurs que ce roman a ainsi fait sa réapparition dans ma vie. Écrit en 1931 et traduit par P.J. Herr pour les éditions Gallimard en 49, il a d'ailleurs fait l'objet d'une révision par Marcel Duhamel et Renée Vavasseur, à en croire la page de garde. Première constatation, le plaisir de parcourir cette histoire sur fond d'élections est toujours aussi intense et incoercible: dès la première page j'ai su que n'allais plus quitter Ned Beaumont, grand joueur devant l'éternel, qui mène l'enquête tout au long de cette histoire complexe peuplée de durs à cuire, de truands au cœur un peu trop tendre et de femmes tourmentées et vénéneuses, jusqu'à ce qu'il ait dénoué ce nœud de vipères. Ned est un solitaire intelligent dans un monde de brutes stupides et bornées, il n'a aucun mal à manipuler les uns contre les autres pour arriver à ses fins même s'il se fait corriger sévèrement à l'occasion. L'intrigue tourne autour du meurtre du fils d'un sénateur en période pré-électorale. Ned est employé et ami dévoué d'un certain Paul Madvig qui tire les ficelles dans l'ombre. Ce dernier charge son homme de main de faire la lumière sur cette affaire qui non seulement compromet sa position de chef de bande mais rend difficile des projets de mariage avec la sœur du défunt. Ce livre est rythmé par l'enquête de Ned Beaumont dont on suit les pérégrinations minute par minute. La clef de verre est construite pour que le lecteur s'identifie inévitablement au héros, souffrant avec lui lorsqu'il se fait tabasser ou pendu à ses lèvres lorsqu'il accouche les témoins au fur et à mesure de l'avancée du récit.

Ce livre de Dashiell Hammett se classe volontiers dans la tradition du roman noir dans lequel le lecteur est constamment au côté du protagoniste principal. C'est une forme de moins en moins pratiquée de nos jours où les auteurs talentueux se font un devoir de rédiger leurs livres sur le modèle cinématographique des récits à destins croisés, sautant d'un chapitre à l'autre dans la peau des différents personnages jusqu'à la rencontre finale. Il est certain que cette forme actuelle demande une préparation soignée et un grand nombre de notes en post-écriture alors que le récit linéaire façon Dashiell Hammet n'est pas sans évoquer un corps à corps schizophrénique entre l'auteur et son personnage. Certains écrivains célèbres prétendent même qu'il est arrivé plus d'une fois que celui-ci leur échappe et n'en fasse qu'à sa tête. Dans le cas de Ned Beaumont, les spécialistes s'accordent d'ailleurs pour estimer qu'il fait partie de ces "doubles" que Dashiell Hammett se plaisait à créer.
Est-il vraiment utile de souligner que le style de Hammett a servi de révélateur et de modèle à de nombreux successeurs, et pas seulement dans la catégorie polar ? Des descriptions au scalpel, des dialogues ciselés, une rigueur impressionnante : Dashiell Hammett est un vrai "maître".


Pour conclure, n'oubliez pas que Moisson rouge, Sang maudit, Le Faucon maltais, La Clé de verre et L'Introuvable ont fait l'objet d'une nouvelle traduction en 2009 signée Pierre Bondil (dont nous avons déjà parlé dans le blog) et Natalie Beunat. Gallimard, coll. Quarto-rom. Vous n'avez donc aucune excuse pour ne pas vous replonger vous aussi dans ces textes fondateurs qui restent indémodables.



Dashiell Hammett naît le 27 mai 1894 à Baltimore, Maryland - Alcoolique et tuberculeux, il meurt à New York en 1961, il y a exactement 50 ans.


Les livres qu'il faut lire:

1924 : Dollars de sang ou Le Grand Braquage (The Big Knockover)

1929 : La Moisson rouge (Red Harvest)

1929 : Sang maudit (The Dain Curse)

1930 : Le Faucon maltais (The Maltese Falcon)

1931 : La Clé de verre, (The Glass Key)

1934 : L'Introuvable (The Thin Man)

et aussi le formidable Hammett signé Joe Gores, qui a servi de base à l'étrange film éponyme de Wim Wenders.

A voir, l'adaptation cinématographique de La clé de verre, tournée par Stuart Heisler en 1942, avec Veronika Lake et Alan Ladd.

6 juillet 2011

Pas de repos pour les morts, 26 auteurs pour un crime

L'éditeur new-yorkais Simon and Schuster vient de publier No rest for the Dead, un thriller signé par pas moins de 26 auteurs* ayant figuré parmi les best-sellers du New York Times.

Un conservateur de musée est assassiné, sa femme est condamnée et exécutée pour le meurtre. Dix ans plus tard, on rouvre le dossier : et si le coupable n'était pas celle qu'on croit ? Le flic qui a mené l'enquête a découvert que le dossier recélait plus d'une zone d'ombre. Complots, manipulations, angoisse, suspense haletant : chaque auteur a donné le meilleur de lui-même au chapitre dont il avait la charge.

L'idée a été lancée par Andrew Gulli, qui dirige le Strand Magazine. "J'avais en tête cette histoire d'une femme injustement exécutée. J'ai écrit le prologue et je l'ai remis au premier auteur. Les autres ont pris la suite!" Aussi simple que ça ? On a peine à le croire !

* Jeff Abbott, Lori Armstrong, Sandra Brown,Thomas Cook,Jeffery Deaver, Diana Gabaldon, Tess Gerritsen, Andrew F. Gulli, Peter James, J.A. Jance, Faye Kellerman, Raymond Khoury, John Lescroart, Jeff Lindsay, Gayle Lynds, Philip Margolin, Alexander McCall Smith, Michael Palmer, T. Jefferson Parker, Matthew Pearl, Kathy Reichs, Marcus Sakey, Jonathan Santlofer, Lisa Scottoline, R.L. Stine, Marcia Talley

5 juillet 2011

Attention, un nazi peut en cacher un autre!

Philip Kerr est un auteur de polars qui n'hésite pas à aborder l'histoire de l'Allemagne nazie sans complexe à travers les aventures d'un ex-commissaire de police devenu détective privé après un passage éclair chez les SS. Après le succès de la Trilogie berlinoise (voir chronique) au cours de laquelle on assistait à la montée et à la chute du IIIe Reich, avec La mort, entre autres c'est au tour des chasseurs de nazis de l'après-guerre (à la veille des années 50) de faire leur entrée dans cette galerie de portraits d'un réalisme parfois déconcertant. L'auteur fait notamment parler ses protagonistes comme on devait certainement s'exprimer en ces temps troubles, utilisant parfois un langage cru ou des situations qui seraient certainement montrées du doigt chez nous par les associations procédurières qui épluchent littérature et autres créations artistiques. Philip Kerr est aussi un véritable écrivain "noir" à la manière des grands aînés d'Outre-Atlantique. Son écriture linéaire est particulièrement plaisante à lire puisqu'il nous place dans la peau de son personnage qui raconte ses péripéties au fur et à mesure du déroulement de l'histoire, ceci à la première personne.

Dans ce roman palpitant, il sera question de manipulations, d'identités volées et de complots longuement mûris puis mis en œuvre par des personnages prêts à tout pour le progrès de la science, quitte à sacrifier des vies humaines sans le moindre scrupule, même s'il s'agit de celles d'anciens tortionnaires nazis. Comme d'habitude, Philip Kerr mélange fiction et réalité, ce qui place ce roman entre le documentaire et le polar traditionnel avec sa cohorte de grosses brutes, de femme fatales, de belles autos et de coups de feu dans la grande tradition du roman noir, sans oublier la petite touche d'humour que tout détective digne de ce nom se doit d'avoir. Soyez certain que Bernie Gunther aura un jour sa place dans le Panthéon des grands personnages marquants de l'histoire du polar... Si ce n'est déjà fait !

Philip Kerr – La mort, entre autres – Traduit de l'anglais par Johan-Frederik Hel Guedj – Le Livre de poche

3 juillet 2011

Grand Prix de Littérature policière 2011 : la sélection du jury

Le Grand Prix de Littérature policière, créé en 1948 par Maurice-Bernard Endrèbe, est considéré comme un des plus importants dans son domaine. Il récompense chaque année un roman français et un roman étranger. Le jury 2011, composé de personnalités du monde littéraire (Dominique Choquet, Christine Ferniot, Pierre Lebedel, Alexandra Schwartzbrod - lauréate du prix 2010 - , Philip Le Roy, Gérard Meudal, Georges Riében, Jean-Jacques Schléret & Alain Régnault), vient de désigner les candidats pour le prix 2011. La délibération aura lieu le 21 septembre. Pour les heureux impétrants, un doux calvaire commence...

ROMANS FRANÇAIS :

- GRANOTIER (Sylvie) : La rigole du diable. – Albin Michel
- KINER (Aline) : Le jeu du pendu. – Liana Lévi
- LAHNER (Louis) : Trois jours à tuer. – Au Diable Vauvert
- LEDUN (Marin) : Les visages écrasés. – Seuil
- LEMAITRE (Pierre) : Alex. – Albin Michel
- LOUBIERE (Sophie) : L’enfant aux cailloux. – Fleuve noir
- MALTE (Marcus) : Les Harmoniques. – Gallimard
- MANOTTI/DOA : L’Honorable société. – Gallimard
- MARPEAU (Elsa) : Les Yeux des morts. – Gallimard
- SIGAUD (Dominique) : Conte d’exploitation – Actes Sud
- VARENNE (Antonin) : Le Mur, le Kabyle et le marin. – V. Hamy

ROMANS ETRANGERS : 

- COOK (Thomas H.): Les leçons du mal. – Seuil
- CARLSON (Ron): Le signal. – Gallmeister
- GONZALES LEDESMA (Francisco): Il ne faut pas mourir deux fois. – L'Atalante
- HARVEY (John): Cold in hand. – Rivages
- MILLAR (Sam): Redemption factory. – Fayard
- NESBO (Jo): Le Léopard. – Gallimard
- NIKITAS (Derek): Brasiers. – Télémaque
- NUNN (Ken): Tijuana Straits. – Sonatine
- SARID (Yishai): Le poète de Gaza. – Actes Sud
- WATSON (S.J.): Avant d’aller dormir. – Sonatine
- WINSLOW (Don): Savages. - Ed. du Masque

Depuis sa fondation, ce prix se caractérise par son éclectisme. Les lauréats des dix dernières années : Alexandra Schwartzbrod, Hervé Le Corre, Caryl Férey, DOA, Catherine Fradier, Philip Le Roy, Virginie Brac et Gilbert Sinouié (ex aequo), Laurent Martin et Patrick Pécherot pour les romans français ; William Gay, Ken Bruen, Camilla Läckberg, Arnaldur Indridason, Larry Beinhart, Ian Rankin, John Katzenbach, Deon Meyer, Peter Dickinson et Peter Robinson pour les romans étrangers.

2 juillet 2011

Devoirs de vacances : un classique par semaine

Dans le train ou l'avion, à la plage, au bord de la piscine, rien de tel qu'un bon vieux polar pour se rafraîchir les idées lorsque le soleil menace de ramollir vos petites cellules grises. Retrouvez 8 chroniques que nous avions consacrées à des incontournables. Ces articles parus dans les premiers jours du Blog vous donneront peut-être envie de foncer à la Maison de la presse locale pour y dépenser moins d'une dizaine d'euros pour des livres toujours disponibles et à consommer sans modération. Bientôt, je vous proposerai un choix de 8 romans récents pour ceux d'entre vous qui connaissent déjà leurs classiques par coeur !

- Le livre fondateur du genre: Edgar Poe - Double assassinat dans la rue Morgue
- Agatha Christie - La mystérieuse affaire de Styles, Roman policier: l'art et la manière dès son premier opus !
- Simenon crée le commissaire Maigret avec Pietr le Letton, paru en 1931
- Patricia Cornwell à découper selon le pointillé
- Elizabeth George : un premier roman noir, très noir
- La trilogie Fabio Montale - Jean-Claude Izzo
- Roger Chapman, un colporteur qui n'a pas froid aux yeux
- Avec Ian Rankin Edimbourg découvre John Rebus

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