15 juin 2011

Crimes à l'italienne

Je ne suis pas folle des nouvelles : si j'aime, j'ai envie que ça continue. Et pourtant, quel meilleur moyen de s'immerger dans une littérature qu'on ne connaît pas encore ? C'est ce que j'ai fait avec ces Petits crimes italiens.
Quand on songe à l'Italie, en général, on pense au soleil, aux chansons, à l'histoire, à l'art. Détrompons-nous... Dans ce recueil de neuf nouvelles par dix auteurs (oui, l'une d'entre elles a été écrite à 4 mains), belle entrée en matière pour découvrir le roman noir à l'italienne, c'est la noirceur qui domine, et pas simplement parce qu'il s'agit de littérature noire. C'est l'atmosphère tout entière qui est noirissime, même lorsque l'humour est de la partie. Ce qui est le cas, notamment avec le texte qui ouvre le livre, Mon trésor, signé Niccolo Ammaniti et Antonio Manzini. Cette fable nous raconte l'histoire pitoyable et terrible d'un chirurgien esthétique complètement camé qui ne trouve pas de meilleure cachette pour son produit préféré que... les seins de la femme qu'il est en train d'opérer. Vous n'imaginez pas jusqu'où il va aller pour récupérer sa mise... Là, on est dans le grinçant, le grotesque, le cruel. Cela se passe à Rome, et le cinéma n'est pas peu présent. Non plus que les milieux du show bizz qui semblent avoir posé une empreinte indélébile sur l'Italie d'aujourd'hui. Dans la deuxième nouvelle, Mort d'un indic, signée Massimo Carlotto, le style est plus classique, mais l'auteur s'attache à dépeindre l'Italie contemporaine et les difficultés qu'elle éprouve face à l'immigration et à l'émergence de nouvelles formes de banditisme. Dans La tanière de Teresa, écrite par  Diego da Silva, c'est le terrorisme qui est au centre de l'histoire, avec une belle peinture psychologique des personnages, y compris celle d'un jeune homme conduit à l'extrémisme, mais qui garde dans sa chambre un poster d'Alberto Sordi. Un jeune homme comme les autres... Giorgi Faletti, dans L'invité d'honneur, sacrifie lui aussi à l'humour et au show bizz avec une nouvelle qui met en scène une vieille gloire de la télé exilée dans les îles, à l'abri des photographes, mais pas de l'amour... Sandrone Dazieri, lui, choisit dans La dernière pique de mettre en scène un duo comique sur le retour dont les retrouvailles basculeront côté tragique une fois que l'un des deux compères aura rencontré l'amour sous la forme d'une belle obsédée par la réussite de son fils dans le monde du spectacle. Andrea Camilleri, dans Equivoques et malentendus, raconte magistralement une histoire banale qui tourne au drame absurde, justifiant parfaitement son titre. Marcello Fois, dans Ce qui manque, donne dans la nouvelle "vraiment" policière, avec de vrais flics dedans. Giancarlo de Cataldo, l'auteur qui est à l'origine de ce recueil, connu pour son Romanzo criminale, nous offre avec L'enfant enlevé par la Befana une fable noire bien dans sa manière. Carlo Lucarelli clôt le recueil en beauté avec Le troisième coup de feu où l'on partage une tranche de vie avec Lara, une héroïne policière singulière.

Une lecture toute en hauts et en bas, une peinture un peu désespérante de l'Italie d'aujourd'hui par des auteurs d'âge et de culture très différents : Ces Petits crimes italiens donnent vraiment envie d'en savoir plus et de choisir un bon gros roman comme je les aime afin de faire plus intimement connaissance de ces auteurs au ton réellement singulier.

Petit crimes italiens, recueil de nouvelles traduites par François Rosso - Points Seuil

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