Voici un roman écrit à quatre mains. Lars Kepler n'est pas un auteur unique, mais un couple qui s'essaie pour la première fois à l'écriture conjugale. Le personnage principal, Erik Maria Bark, est psy à l'hôpital Karolinska de Stockholm. Sa charmante épouse, Simone, vient de s'offrir une galerie d'art dans le quartier "bobo" de la ville, leur fils préadolescent, Benjamin, souffre d'hémophilie. Tout irait bien si une famille n'avait pas la mauvaise idée de se faire littéralement massacrer dans d'épouvantables conditions. Seul le fils, Joseph, un adolescent, échappe à l'extermination. On finit par le retrouver en état de choc. C'est alors que le flic chargé de l'enquête, Joona Linna, demande à Bark de revenir à ses premières amours auxquelles il s'était juré de ne plus retoucher : l'hypnose. Pour faire parler ce Joseph et protéger la seule survivante de la famille, une soeur aînée qui vit seule. Bien mal lui en prend : on imagine bien que si Erik a renoncé à l'hypnose 10 ans auparavant, ce n'est pas pour rien...
Toutes les clés de cette histoire sont dans le passé, l'histoire des personnages. Le livre est donc construit en conséquence, avec un long passage qui nous ramène 10 ans en arrière, à l'époque des expériences d'hypnose de Bark, celles qui l'ont conduit au renoncement. Jusque-là, le rythme est plutôt régulier, les événements surviennent à une cadence bien calculée, les personnages prennent un peu de corps, même si j'ai eu du mal avec les histoires de Pokemon qu'ont exhumées les auteurs pour justifier les pratiques d'une bande de gamins franchement mal élevés qui tournent autour du jeune Benjamin. On commence à s'intéresser à leur sort, à s'inquiéter pour le fils disparu, pour le couple qui va à vau-l'eau. Et puis bam ! Les auteurs nous plongent tout droit dans un cours d'hypnose et nous ramènent dix ans en arrière, du temps où Erik Maria Bark soignait ses patients en groupes de thérapie. Certes, les auteurs se sont documentés (je n'ai pas de compétences pour en juger, mais je suis sûre qu'ils n'auraient pas commis une telle erreur). Mais franchement les quelques chapitres qui nous mettent en présence d'un groupe de patients et de leurs névroses et psychoses diverses à travers des séances interminables ont bien failli avoir raison de ma patience. Bon, je me suis accrochée, et je dois dire que j'ai bien fait, car la fin du roman est particulièrement réussie dans le genre suspense et action en pays glacial !
Je ne vais pas vous mentir, je n'ai pas été hypnotisée par ce livre (facile, mais ils l'ont bien cherché). L'écriture est plutôt factuelle, les quelques passages non narratifs n'ont pas beaucoup d'intérêt - sauf peut-être si on est Suédois, car les noms des rues et des lieux sont soigneusement détaillés. Sauf que quand Mankell et Piersanti écrivent un nom de rue, on a immédiatement envie d'aller voir sur Google maps à quoi ça ressemble. Là, à vrai dire, on s'en fiche un peu. Les personnages gagneraient à davantage de subtilité pour être vraiment attachants, les situations à échapper aux clichés - les scènes de sexe souffrent particulièrement de ce défaut-là. Enfin, on notera que certaines réactions des personnages sont... surprenantes. Les auteurs ont fait leur travail, satisfait au cahier des charges (on va jusqu'au bout), mais pas réussi à me donner envie de lire un autre roman signé Lars Kepler.
Lars Kepler, L'hypnotiseur - Actes sud - Traduit du suédois par Hege Roel-Rousson et Pascale Rosier
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