Le nouveau Rankin, Doors open, sort en septembre. En attendant, voilà de quoi vous rafraîchir la mémoire avec une rétrospective de tous les romans de Rankin, les Rebus bien sûr mais aussi les autres. Pas tout d'un coup : un feuilleton d'été, en quelque sorte!
Mini-biographie
Ian Rankin est né en 1960 à Cardenden, village minier situé dans le comté de Fife, en Ecosse bien sûr. La famille est modeste, le père de Ian Rankin est mineur. A la fin des années 60, la famille quitte la ville car la mine ferme. Ian Rankin sera le premier de sa famille à faire des études supérieures. A noter : John Rebus est lui aussi originaire de Cardenden...
Une vidéo du retour de Ian Rankin à son village natal
Diplômé en littérature américaine de l'Université d'Edimbourg en 1982, il travaille à une thèse de doctorat sur la littérature écossaise, et plus particulièrement Muriel Spark. Il exerce d'innombrables petits boulots: vendangeur, postier, journaliste, secrétaire et bien sûr... musicien punk avec son groupe les Dancing Pigs. Après son diplôme, il donne également des cours à l'Université d'Edimbourg. En 1986, il épouse Miranda Harvey, puis s'installe à Londres pour 4 ans. Il publie The Flood en 1986, puisl e premier volume de la série John Rebus, L'étrangleur d'Edimbourg, en 1987. Entre 1990 et 1996, il vit dans le Périgord, où il écrit sept romans de la série Rebus ainsi que les livres publiés sous le pseudonyme de Jack Harvey. Pendant tout ce temps, aucun de ses livres n'est encore traduit en français. Puis c'est le retour à Edimbourg, où vivent encore Ian Rankin, sa femme et ses deux fils. La dernière enquête de John Rebus, Exit Music, paraît en Angleterre en 2007 et en France en 2010. Aujourd'hui, ses livres sont traduits en 22 langues. Quatre fois récompensé par la Crime Writers' Association, il a également obtenu l'Edgar américain en 2004.
The Flood (1987)
Un roman où l'on trouve déjà toutes les thématiques qui seront développées dans les futurs Rebus, mais qui n'est pas à proprement parler un roman policier. The Flood, non traduit en français, a été publié alors que Rankin était encore à l'Université. Comme par hasard, l'histoire se passe dans une petite ville nommée Carsden, et le personnage principal s'appelle Sandy, le prénom d'un des camarades de classe de Ian Rankin. L'histoire, celle d'une femme marginale et de son fils, essayant d'échapper à un passé lourd de secrets et de douleurs, est une intrigue simple mais forte. D'après l'auteur lui-même : "L'histoire parle d'un adolescent marginal qui grandit dans la même ville que moi, qui tombe amoureux de la fille qu'il ne fallait pas aimer. Une histoire plutôt traditionnelle, faisant largement appel aux mythes et aux symboles." Déjà dans ces pages, on trouve déjà l'acuité de perception d'un auteur sensible et déterminé.
L'étrangleur d'Edimbourg (Knots and Crosses)- 1988 - traduit de l'anglais (Écosse) par Frédéric Grellier, Le Livre de poche, 2004
Le premier John Rebus... Cela mérite bien qu'on s'y attarde un peu. L'histoire se passe... à Edimbourg ! Edimbourg tient dans l'oeuvre de Rankin une place prépondérante, pratiquement aussi importante que celle de John Rebus. Mais chez Rankin, on ne fait pas dans le touristique. C'est le revers de la médaille qui l'intéresse, avec tous les aspects sociaux et politiques que cela implique. Dans ce premier livre, on fait la connaissance de John Rebus, 31 ans, au moment où il effectue un de ses rares pèlerinages dans la région où il est né, pour se rendre sur la tombe de son père. Retour aux sources douloureux, retrouvailles peu chaleureuses avec un frère devenu hypnotiseur à succès. Il pleut, bien sûr. On comprend vite que John Rebus l'inspecteur n'est pas vraiment un "family man" : il est mal à l'aise, ne sait pas quoi dire à ce frère qui est devenu un étranger. De retour à Edimbourg, dans son élément, ce qui l'attend n'est pas réjouissant : une sordide affaire d'enlèvements et de meurtres d'enfants. Deux petites filles viennent d'être retrouvées mortes. John Rebus a beau être un ancien des SAS, il n'en a pas pour autant le coeur sec. L'enquête va être difficile, malgré une profusion d'indices sous la forme de noeuds et de croix (d'où le titre original) qui ont le pouvoir de brouiller les pistes à la puissance 10, accompagnés de messages abscons adressés à l'inspecteur Rebus. Périlleuse aussi, puisqu'elle mettra en danger la famille même de Rebus, et en particulier sa fille Samantha.
Comparé aux livres suivants de la série des Rebus, L'étrangleur d'Edimbourg est un petit livre (288 pages). Et pourtant, Ian Rankin réussit le tour de force de mener le lecteur par le bout du nez dans une intrigue à rebondissements, tout en mettant en scène un personnage fort et tout de suite très attachant dans le cadre d'un Edimbourg débarrassé de ses oripeaux folkloriques, tout entier dans ses bas quartiers, ses secrets inavouables, ses lieux infréquentables. Si Rankin évoque souvent Stevenson, ce n'est pas par hasard : dans ses romans, il s'attache à nous montrer l'envers du décor, le côté Mr. Hyde de la capitale écossaise. Rebus boit trop, c'est sûr. Heureusement pour nous, car c'est l'occasion pour Rankin de nous offrir ses inimitables scènes de pub. Il fume trop aussi, il n'est pas un brave type, il s'est fait plaquer par sa femme... Et il se réfugie volontiers dans la musique, assis dans son fauteuil jusqu'à pas d'heure pour combattre ses vieux démons, au beau milieu d'une enquête sordide... Rankin dit qu'avec ce roman, il n'avait pas l'intention de créer un héros récurrent. On a connu des erreurs plus fatales, puisqu'au final, nous retrouverons John Rebus au coeur de... 17 romans !
The Watchman - 1988 - non traduit en français
Pas de Rebus dans The Watchman, mais un espion, Miles Flint, un drôle de type un peu (beaucoup) voyeur, qui prend un certain plaisir à s'immiscer dans la vie privée de ceux qu'il surveille. Tant et si bien qu'il finit par s'amouracher d'une belle Irlandaise, aux dépens de son couple qui s'effrite à toute vitesse. Tout se complique quand Miles Flint part pour Belfast... Ecoutons l'auteur : "Pour The Watchman, je crois que j'ai été très influencé par les anti-héros de Le Carré et de Graham Greene (...)" Un livre rapide, à la structure cinématographique, bourré de clins d'oeil, y compris à John Rebus.
Westwind - 1990 - non traduit en français
A l'origine, une drôle de chose bourrée d'humour basée sur la théorie du complot et située aux Etats-Unis. Navettes spatiales, satellites espions et compagnie... Las, l'éditeur de Ian Rankin n'aime pas ça : il lui demande d'enlever l'humour et les Etats-Unis. Du coup, l'auteur a l'impression d'être dépossédé de son oeuvre. Apparemment introuvable, cette curiosité est devenue un objet de collection !
Le fond de l'enfer (Hide and Seek) - 1991, traduit de l'anglais par Frédéric Grellier, le Livre de poche 2004
Le retour de l'inspecteur Rebus dans une histoire bien noire. Edimbourg toujours, un squat, des junkies, un cadavre, et tout le monde s'en fout. Sauf John Rebus. Tout le monde se contenterait bien d'une bonne vieille overdose. Mais les circonstances de la mort, sa mise en scène, disent à Rebus qu'il s'agit d'un meurtre pas comme les autres. Du rythme, un mélange de lyrisme et de réalisme très personnel, le style de Ian Rankin s'affirme. L'intrigue est haletante à souhait, le contexte social particulièrement oppressant, les constats noirissimes. Un véritable envol pour John Rebus.
(à suivre...)
L'actualité totalement subjective du roman policier et du roman noir, films, salons, rencontres avec des auteurs,...
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