Vendredi soir, 22h30 au coin du bd Saint-Michel et du bd Saint-Germain. Un seul magasin est encore ouvert, Boulinier. Devant les bacs sur le trottoir, des noctambules polarophiles cherchent frénétiquement la perle rare. Je me joins à eux et rapidement, je tombe sur quelques Série noire qui n'étaient pas encore dans ma bibliothèque, dont l'Oedipe Roi de Didier Lamaison, une réécriture de la tragédie de Sophocle. L'ami avec qui on a partagé une pizza d'avant razzia, est plutôt BD. Ça tombe bien, Boulinier aussi ! Du fond du magasin, j'entends une exclamation. Fred agite les bras, brandissant deux albums aux couvertures colorées. Je m'approche et il me montre la « compil » Tout Gil Jourdan, volumes 1 et 2, parus chez Dupuis. Il s'agit de deux BD mythiques pour les gamins qui ont usé leurs fonds de culottes sur les bancs de l'école dans les années 60. Ce petit personnage sorti du crayon de Maurice Tillieux est un jeune licencié en droit, détective privé à ses heures. Le graphisme est typique de l'époque Gaston Lagaffe et Achille Talon : bonshommes rondouillards, courts sur pattes, pas trop regardant sur le nombre de doigts qu'il faut pour dessiner une main, un dessin au trait avec des décors néanmoins assez fouillés et systématiquement les trois ou quatre cases dont les phylactères sont parfois plus gros que le dessin lui-même. On retrouvera avec bonheur les Dauphine, Aronde, Panhard et autres Simca 1000 aux couleurs pétantes, l'inspecteur Crouton, sans « d » et sans « t » mais avec une grosse moustache rousse, et un bandit sympathique répondant au doux nom de Libellule. N'y connaissant pas grand'chose*, j'ai demandé à Fred de nous dire « de quoi ça cause ». « Parue à partir de 1956 dans Spirou, cette BD est tout à fait dans l'esprit des romans d'aventure qu'on trouvait en librairie, comme Bob Morane, avec l'humour potache et bon enfant des publications de cette époque, qui ne devaient ni choquer ni mettre la morale en péril. Un peu comme du Loulou la Brocante pour gamins! C'est moins l'histoire que le dessin qui est intéressant. Dans la BD, c'est comme dans la littérature, on ne peut que prendre plaisir à relire ses classiques, même si Tillieux n'est pas le Stendhal des aventures à bulles. Et puis de toute façon, quand on s'intéresse au dessin, il reste toujours de la place dans la bibliothèque. » Bilan de la soirée: un Série noire qui fera certainement l'objet d'une chronique un de ces jours et deux BD nostalgie.
> Pour en savoir plus, la page Wikipedia consacrée à Gil Jourdan
> Et celle de Maurice Tillieux
* Ça me fait penser qu'il faudra qu'un jour on fasse une page spéciale sur la BD et le polar. Si quelqu'un veut partager ses connaissances sur le sujet, il est le bienvenu !
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