16 août 2011

Marcus Malte, un jardin d'amour à perdre la raison

Un des premiers posts de l'ancêtre de ce blog était consacré au premier roman de Marcus Malte, Le doigt d'Horace. Je me rappelle qu'il se terminait par une promesse : celle de lire très vite un autre livre de Marcus Malte. Il m'a fallu le temps, mais voilà, c'est fait avec Garden of Love. Inutile de dire que je me battrais d'avoir tant tardé. Car si Le doigt d'Horace était déjà un roman original, surprenant, d'une écriture racée, Garden of Love est un bijou. Un de ces bijoux qui ne brillent pas dans la vitrine, mais qui se révèle d'autant plus précieux qu'il faut le mériter un peu ! Ce livre est exigeant. Il ne fait pas partie de ces romans qu'on lit distraitement, on l'on saute quelques paragraphes sans même s'en rendre compte, bref où finalement on a hâte d'en terminer. Garden of Love se lit attentivement, on s'y immerge, on se laisse prendre par la main, lâcher, ratrapper, tomber en tourbillonnant au fond d'un trou, comme Alice au pays des noires merveilles, puis ressurgir essoufflé à la surface du monde.

Je vous entends d'ici : "Mais qu'est-ce qui lui prend ?". Eh bien il me prend qu'un livre comme celui-là, dans une vie de lectrice, est à marquer d'une pierre... noire. Difficile, voire impossible, de faire un résumé de l'histoire, car l'histoire est un crescendo vers une vérité déchirante et incroyable. Garden of Love, c'est plutôt qu'un jardin, un labyrinthe humain où les personnages parlent, se taisent, laissent la place à un autre personnage parallèle, à moins que... C'est une histoire d'enfance égarée, une histoire de deuil et de solitude éperdue, une histoire d'hommes et de femmes qui se cherchent tellement qu'ils finissent par se perdre, une histoire de nostalgie et de douleurs. Des hommes, des femmes, des enfants, des âges de la vie qui s'entrecroisent et se rejoignent. Plonger dans ce livre, consentir aux exigences de l'auteur, tel est le prix à payer pour découvrir une œuvre forte, qu'on ne lâche pas une fois qu'on l'a commencée. Plonger dans ce livre, c'est pratiquement... obligatoire !
Une petite explication sur le titre : il est tiré d'un poème de William Blake :
"So I turn'd to the Garden of Love
That so many sweet flowers bore;
And I saw it was filled with graves
"
(Alors je me tournai vers le Jardin de l'Amour
Qui portait tant de fleurs exquises;
Et je vis qu'il était rempli de tombes."

Marcus Malte, Garden of Love - Zulma, 2007

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