
Présenté en compétition officielle à Cannes en 2009, il obtient tout simplement le Grand prix du jury et à peine quelques mois plus tard, le Prix Louis-Delluc. Enfin pour couronner le tout voici qu'à la cérémonie des César du cinéma 2010, il gagne pas moins de 9 récompenses dont celles du meilleur film et du meilleur réalisateur. Je ne sais pourquoi mais j'ai eu récemment envie de voir ce à côté de quoi j'étais alors passé. Peut-être justement parce qu'on en parlait un peu trop dans la presse. Le tapage médiatique a généralement tendance à me donner envie de tourner la tête et bien sûr c'est une erreur impardonnable (si, si...) puisque ce film que je viens juste de visionner ce soir en DVD s'est révélé encore meilleur que je ne le pensais. Non seulement par le contenant, la qualité de la mise en scène, la façon de filmer, les plans et la lumière... bref tout ce qui fait un bon film, mais aussi par le contenu réaliste qui ne manquera pas d’intéresser ceux que l'actualité ne laisse pas indifférents. L'histoire se passe sur 3 ans mais le metteur en scène n’insiste pas trop sur cette notion de durée car le récit linéaire est fragmenté en séquences clefs qui jalonnent l'itinéraire du héros interprété avec brio par Tahar Rahim dans le rôle de Malik El Djebena, jeune délinquant qui passera en quelques années de l'état d’illettré à celui de chef de bande accompli. La plupart des scènes se situent dans une prison qui tient le troisième rôle, juste après Niels Arestrup en magnifique vieux truand corse sur le déclin. Le lieu est bien sûr sinistre mais pourtant ne donne pas l'impression d'être affreux, juste violent et viril comme on pouvait s'y attendre, à l'image des truands qui le peuplent. Jacques Audiard esquisse déjà la montée des extrémismes et les prosélytismes religieux confrontés à la vieille tradition du gangstérisme de grand-papa incarnée par une bande de Corses qui peu à peu désertent les lieux au profit de jeunes délinquants aux origines explicites. Pour ne pas lasser le spectateur en le cantonnant dans un même espace clos, le réalisateur utilise les moments de semi-liberté du jeune homme, après deux ans et demi d’incarcération, pour ajouter suspens et action au film qui ne manque pas de vitalité. Un peu comme une course de fond avec ses accélérations et ses ralentissements pour reprendre son souffle. La confrontation entre Tahar Rahim et Niels Arestrup est une réussite en soi. Pendant 156 minutes on voit la marionnette tout d'abord obligée d'accomplir le pire crime pour obtenir une protection, couper un à un ses fils et finir par tirer à son tour les ficelles jusqu'à la déchéance de son mentor. Jacques Audiard confirmait avec Un Prophète qu'il était au zénith de son art et qu'il laissera son empreinte sur le cinéma pour les générations futures.
Fred
Enorme film, qui marque durablement le spectateur. Votre conclusion est pertinente, parce qu'on n'a pas fini d'en parler, de ce film.
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