15 avril 2012

Un film, un soir - Les gangs de New York au milieu du XIXe siècle vus par Martin Scorsese

Le hasard fait bien les choses, puisque cette fois-ci c'est sur Gangs of New York, chef-d’œuvre incontestable et pourtant contesté par la critique en son temps, que je suis tombé. Monument du cinéma des années 2000, cette fresque shakespearienne respectant la fameuse unité de lieu si chère au théâtre classique nous plonge dans une Amérique en pleine guerre civile au sein de ce qui va devenir Manhattan. Le face à face Leonardo di Caprio et Daniel Day Lewis est traité comme une tragédie antique avec son cortège de personnages hauts en couleur qui ont troqué la toge contre de superbes pantalons à carreaux, dans un contexte historique qui bien que spectaculaire, n'en est pourtant représenté que sous la forme de quelques lignes dans les livres d'histoire.
Pendant 167 minutes, on reste collé sur son siège en se demandant pourquoi Martin Scorsese a mis tant d'énergie dans cette fresque qui a failli lui coûter toutes ses économies ! Cette place où se côtoient "natifs" et émigrés, notamment irlandais, est en soi un personnage clé du film dont les décors auraient largement mérité Oscars et tutti quanti. Personnellement, je regrette que les personnages clés soient exclusivement représentés à travers leur caractère emblématique, en faisant abstraction de la psychologie pure qui est représentée uniquement par leurs actions. D'ailleurs, les dialogues ne sont pas très présents et on peut regretter que les causes profondes des événements ne soient traitées qu'à travers la violence de l'action. Il manque par exemple une analyse plus profonde de la psychologie des émigrants, qui dès leur débarquement du bateau, sont confrontés à un choix très simple : crever de faim dans une Amérique torturée par la guerre de Sécession, ou une conscription volontaire dans les armées de Lincoln, qui les conduit inéluctablement vers une fin tragique représentée par des alignements de cercueils sur les quais de New York. Curieusement, ce film n'a fait penser par sa thématique à  Far and away (Horizons lointains) de Ron Howard, totalement différent par la forme et évoquant pourtant avec autant de conviction la misère des émigrés irlandais posant le pied sur le sol américain. Dix ans plus tôt, Tom Cruise et Nicole Kidman connaissaient comme Leonardo di Caprio et Cameron Diaz deux destins tragiques pour qui le rêve américain aura tout du cauchemar. En général, un film en entraînant un autre et ainsi de suite, j'ai très envie de revoir There will be blood, où là aussi Daniel Day Lewis fait preuve d'un talent d'acteur remarquable dans le rôle d'un personnage tout aussi halluciné et fascinant.
Humfred

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