10 novembre 2012

Zola et l'anthropologie criminelle. Plus fort que la télé réalité !

De Zola le lycée nous a laissé le souvenir d'un homme engagé qui se battait bec et ongles pour ses idées et décrivait dans ses livres les acteurs de son temps sans concession. Mais ce que l'on ignore plus volontiers c'est sa passion pour l'analyse psychologique des criminels qui ressort dans plusieurs de ses oeuvres dont La bête humaine est au premier rang. Après le succès de Thérèse Raquin qui mettait en scène un couple de meurtriers qui comme dans Dostoïevski finira dans le repentir par le sacrifice Zola se lance dans l'écriture d'un "drame violent destiné à donner des cauchemars à tout Paris". C'est ainsi qu'il décrit son travail préparatoire pour La bête humaine qui fait appel à l'anthropologie criminelle très en vogue à cette époque.
Nous sommes à l'automne 1888 et les affaires de meurtres font la une des journaux à sensations que l'on s'arrache pour découvrir des histoires à vous couper le souffle. De son côté l'auteur qui ne veut pas tomber dans la facilité d'une écriture approximative se plonge dans la documentation officielle des méthodes d'enquête de son temps, dont probablement L'homme criminel : criminel-né, fou moral, épileptique, étude criminelle et médico-légale de Cesare Lombroso, un Italien, ou La criminalité comparée de Tarde. Il en déduira comme ses contemporains que le crime est une sorte de résurgence de l'état animal ou sauvage qui laisse à penser que le meurtrier est resté au stade d'évolution proche de l'enfance qui comme on le pensait ne connait pas encore la différence entre le bien et le mal. Son livre est construit en étapes progressives pour conduire le lecteur vers une réflexion sur son potentiel criminel, décrivant le parcours du meurtrier jusqu'aux moments d’absence criminels qui produisent le drame. Ensuite il y a l'enquête proprement dite qui est décrite avec un réalisme certain. Zola peut aisément revendiquer, en tout cas pour une partie de son oeuvre, le titre d'auteur de polars que ne renieront pas les générations futures et dont nos contemporains feraient bien de s'inspirer. Je vous engage comme je l'ai fait cette semaine à vous plonger dans La bête humaine sans a priori en oubliant que ce bouquin a en son temps pris une grande place dans nos cartables et dans nos têtes déjà bien encombrées. D'ailleurs c'est bien simple, dès la première page, comme un film que l'on revoit une dizaine d'années plus tard, le souvenir du pensum fait place au plaisir. Ce livre phare de la littérature policière au même titre que Crime et châtiment offre les mêmes sensations et le même frisson que la projection d'un film en costume qui séduit déjà par son côté historique et visuel. Ensuite vous plongerez en apnée au plus profond de l’âme humaine qui n'a finalement pas beaucoup évolué avec le temps et aurait même parfois tendance à redescendre bien plus bas ces derniers temps.
Fred

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