13 janvier 2013

Avec "Promenade du crime", Peter Guttridge nous emmène à Brighton, et pas en touriste

Ah ! Brighton... Que de souvenirs pour les collégiens français qui y ont passé des séjours "linguistiques"... Eh bien Brighton, ce n'est pas seulement la fiesta et les petites Anglaises, croyez-en Peter Guttridge, qui signe avec sa trilogie un portrait au vitriol d'une ville balnéaire corrompue, pourrie jusqu'à la moelle ou presque. En toile de fond: 1934 et deux affaires de corps de femmes dépecés et retrouvés dans des malles à Brighton. La première affaire ne fut jamais élucidée. Pour la seconde, un certain Tony Mancini fut jugé mais relaxé faute de preuves. En 1976, avant de mourir, il avouera le meurtre à un journaliste... Brighton, ce n'est pas seulement la jetée, le Pavillon royal et le front de mer. C'est aussi Milldean, quartier créé de toutes pièces par Peter Guttridge, où les touristes ne vont pas, et où se trament tous les trafics.
C'est justement dans ce quartier que Bob Watts, chef de la police locale et partisan connu du port d'armes dans la police, a mis en place une souricière destinée à piéger un malfrat censé se trouver dans une des maisons. Ils donnent l'assaut... et c'est le massacre. Quatre morts, parmi lesquels ne se trouve pas le malfrat en question, un désordre indescriptible, la panique totale, bref une opération catastrophe. Watts défend ses troupes, au-delà du défendable. La presse nationale s'en mêle, la pression est forte, il doit démissionner. D'un seul coup, il perd son boulot et sa femme dépressive, Molly, qui le fiche dehors avec pertes et fracas. Le sergent Sarah Gilchrist, qui faisait partie du dispositif, est mise à pied. Puis réintégrée. Elle a de la chance : parmi les policiers qui ont donné l'assaut, peu ont cette veine, et même certains disparaissent...
Pendant ce temps-là, la journaliste Kate Simpson mène l'enquête sur le crime de 1934 : elle tombe sur une mine d'or, à savoir un journal tenu par un mystérieux policier pendant l'enquête. Quel rapport entre la mégabavure contemporaine et le crime historique? A priori, aucun, sauf les pères des principaux personnages. A commencer par le père de Kate, William Simpson, éminence grise du gouvernement qui a des choses à cacher. Et puis le père de Bob Watts, auteur de romans policiers et ex-flic. Et ce n'est pas fini. Ajoutons à la galerie de portraits John Hathaway, cador du crime à Brighton, James Tingley, ami de Bob  Watts, ancien SAS et consultant en sécurité et voilà : le décor est planté.Tout est prêt pour un roman savamment ficelé, très documenté, mêlant habilement fiction et réalité, passé et présent. Promenade du crime, premier volume de la trilogie, se lit avec avidité. Un style particulièrement travaillé, un vocabulaire riche, des dialogues au cordeau : il s'apprécie pour l'intrigue bien sûr, mais aussi pour un véritable plaisir de lecture. Guttridge a la métaphore efficace, la formule qui tue, on sent qu'il a publié avant cette trilogie un certain nombre de romans humoristico-policiers. Là, on est loin de la dérision, Guttridge entre vraiment dans la cour des grands. Et Peter James, l'autre auteur de Brighton, n'a qu'à bien se tenir ! Guttridge prend d'ailleurs un risque calculé, puisqu'il laisse son lecteur dans l'attente de la véritable résolution des deux affaires. Vous savez ce qu'il vous reste à faire: le deuxième volume de la trilogie, Le dernier roi de Brighton, vient de sortir. J'ai lu les premières pages, et je peux vous assurer que la tension ne retombe pas... Le prologue, en particulier, d'une violence et d'un réalisme inouïs, laisse augurer d'une belle nuit blanche... Nous y reviendrons très vite.

Peter Guttridge, Promenade du crime, traduit de l'anglais par Jean-René Dastugue, éditions du Rouergue

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