Un feu dans la plaine est un des premiers titres parus dans la nouvelle collection Equinox créée aux Arènes par Aurélien Masson, ancien "patron" de la Série noire. Ce dernier l'a affirmé à plusieurs reprises, il est convaincu que la littérature noire et la critique sociale vont main dans la main, et Un feu dans la plaine pourrait être la manifestation pure et dure de cette conviction. Dans son premier livre, le photographe Thomas Sands raconte un parcours de révolte et de colère et fait la description sans une once d'optimisme d'un monde d'où ont disparu toute notion de justice et d'espoir. C'est dire que ce court texte est d'une noirceur absolue, le versant nuit de l'équinoxe.
Vingt-trois ans, le personnage principal de Un feu dans la plaine est un solitaire. Une mère brutalement fichue à la porte de son emploi, un père volatilisé depuis longtemps, une situation précaire, le chômage, la pauvreté, le lycée technique qui mène directement à la misère, les cités, les conneries, la taule, la violence inouïe. Plus de racines. Il occupe des emplois aussi éphémères qu'ordinaires, ceux qu'on autorise aux gens comme lui; vigile, videur, gardien. Du côté de la sécurité en quelque sorte, ironie du sort.
On imagine bien que cela ne va pas durer, car notre héros n'est pas du genre à rentrer dans le rang. Il lui reste un peu d'argent. Il s'embarque pour l'ultime équipée sauvage. Une de celles dont on ne revient pas. A bord de sa vieille R5, il trace au-delà des banlieues sinistrées, des aires d'autoroute; et l'autoradio qui raconte l'histoire d'une usine qui va fermer et donne la parole aux ouvriers en lutte. Embarqué pour une fuite sans but, notre héros s'empare de cette cause-là, qui n'est pas la sienne, mais qui va incarner toutes les révoltes qui s'affrontent en lui. Nous sommes en mai 2017, c'est la fin de la campagne électorale, la macronie s'apprête à prendre le pouvoir. Et avec elle tous ses partisans, start-uppers sans start-ups, ambitieux de tout poil, imbéciles sans foi ni loi. Et puis tous les autres, ceux qui n'ont pas encore compris que leur destin était scellé et qui se sont trouvé une désespérante Jeanne d'Arc... A travers les banlieues, les parkings, les ignobles zones commerciales, les villes de province exsangues, dépouillées de leurs enseignes, l'homme va lutter avec ceux qui ont tout à perdre - leur travail, leur maison, le peu d'argent qu'ils ont pu économiser, leur dignité. Ultime salve avant la catastrophe...
Si l'on y regarde de près, on remarque que le mot "roman" ne figure pas sur la couverture de Un feu dans la plaine. Ni dans la biographie, minimaliste, de son auteur, qui dit seulement que Un feu dans la plaine est son premier livre. Le texte est une longue charge; lourde en désespoir, en violence et en colère, contre le monde qui est en train de se dessiner devant nous, et dont nous sommes, aussi, responsables. Une charge ponctuée de fulgurances stylistiques, et qui donne, malgré le risque pris par l'auteur - celui de ne convaincre que les convaincus - envie de savoir quelle direction il va prendre pour son prochain livre. Patience donc ...
Si l'on y regarde de près, on remarque que le mot "roman" ne figure pas sur la couverture de Un feu dans la plaine. Ni dans la biographie, minimaliste, de son auteur, qui dit seulement que Un feu dans la plaine est son premier livre. Le texte est une longue charge; lourde en désespoir, en violence et en colère, contre le monde qui est en train de se dessiner devant nous, et dont nous sommes, aussi, responsables. Une charge ponctuée de fulgurances stylistiques, et qui donne, malgré le risque pris par l'auteur - celui de ne convaincre que les convaincus - envie de savoir quelle direction il va prendre pour son prochain livre. Patience donc ...
Thomas Sands, Un feu dans la plaine, collection Equinox, Les Arènes
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