7 septembre 2012

Un nouveau héros pour Ian Rankin : Malcolm Fox dans Plaintes

Les fans de Ian Rankin se rongent les ongles depuis deux ans, date de la parution de Exit Music, la dernière enquête de John Rebus, désormais à la retraite. Rankin a fait durer le plaisir en beauté avec Portes ouvertes, paru l'année dernière, sorte d'entracte jubilatoire qui n'a fait qu'aiguiser notre curiosité. Eh bien voilà, ça y est, le mystère est sur le point d'être éclairci. Laissez-moi vous présenter Malcolm Fox, personnage principal de Plaintes, le tout nouveau Ian Rankin.
Le sieur Fox a la petite quarantaine, il habite... à Edimbourg et il est policier. Mais pas un policier à la Rebus, puisqu'il fait partie de cette section qu'on appelle ici la police des polices, et à Edimbourg la section des Plaintes. Eh oui, Malcolm Fox est chargé de traquer la corruption, l'incompétence, la transgression chez ses collègues de la police. Alors évidemment, son image n'est pas terrible auprès des dits collègues. Mouchard, fouineur... aucun qualificatif n'est de trop pour décrire ce que les flics pensent de lui et de son équipe. Dès la première page, on est dans l'ambiance : il neige sur Edimbourg. Et Foxy, ses bretelles et sa cravate sont sur les dents. Il viennent de choper Glen Heaton au bout d'un an d'enquête. Heaton, flic depuis 15 ans, qui a passé les trois quarts de sa carrière à divulguer des informations à ses potes journalistes, mais aussi aux malfrats d'Edimbourg. Il est temps pour Fox et ses équipiers Tony Kaye et Joe Naysmith, de passer à l'affaire suivante : le jeune flic Jamie Breck est soupçonné de faire partie d'un réseau pédophile. Stratégie : Fox doit se lier d'amitié avec Jamie Breck sous prétexte de lui parler de Heaton. Problème : Breck est franchement sympa, même s'il est tout le contraire de Fox. Ce dernier est sobre, posé, rigoureux, normal quoi. Breck est plutôt chien fou, ce qui n'est pas pour déplaire à Fox, dont la vie privée n'est pas folichonne. Il vit seul, après un mariage-divorce éclair, rend visite à son vieux père à la maison de retraite, et s'efforce de s'occuper un peu de sa sœur qui vit avec Vince, un type plutôt violent qui ne l'emportera pas en paradis. Il ne faudra pas longtemps à Fox pour se retrouver dans de sales draps : bientôt, la situation se retourne et de chasseur, il devient chassé. Et bien sûr, c'est là que ça devient franchement intéressant...
Alors voilà. Malcolm Fox. A première vue, on ne saurait faire plus différent de John Rebus, vieux briscard neurasthénique, alcoolo et amateur de rock. Et pourtant... Fox ne boit pas, mais visiblement il a bu, dans une autre vie. Il est normal, certes, mais plutôt solitaire quand même. Ce qui manque vraiment, ce sont les moments où Rebus, assis dans son fauteuil, un verre à la main, s'endormait aux petites heures de l'aube, un disque des Stones tournant en boucle sur sa platine... Foin de la nostalgie, Malcolm Fox est un personnage d'autant plus intéressant qu'il est un homme normal dans une situation éminemment anormale : celle qui consiste à fliquer ses collègues flics... Rankin n'a pas perdu la main et nous a concocté une belle intrigue qui lui permet d'évoquer les effets de la crise financière sur sa ville d'Edimbourg. Les bâtiments des nouveaux quartiers restent inachevés, les faillites ont eu raison de bien des promoteurs, la pauvreté a repris du poil de la bête. Mais d'autres ont su tirer leur épingle du jeu, avec des méthodes pas franchement avouables. Plus que jamais, Ian Rankin ancre son histoire dans la réalité, et même si Fox, moins déprimé et moins cynique que Rebus, âge oblige, nous montre Edimbourg sous un jour un peu moins sombre, la réalité s'invite aux premières loges de l'histoire que nous raconte Ian Rankin. Et comme d'habitude, cette réalité-là est bien plus effrayante que certains serial killers... Bref, Ian Rankin passe l'obstacle avec brio, et négocie avec élégance un virage dangereux. Fans, vous pouvez être rassurés, Malcolm Fox est un vrai personnage à suivre. Sa deuxième enquête The Impossible Dead, que nous lirons ici l'an prochain sûrement, ne fait que nous conforter dans cette certitude. Et si vous n'avez jamais lu Ian Rankin, c'est le moment de le découvrir. La naissance d'un héros, ça ne se rate pas!

Ian Rankin, Plaintes, traduit de l'anglais par Philippe Loubat-Delranc, Le Masque, en librairie à partir du 12 septembre.

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