24 avril 2011

RJ Ellory, Comme un torrent (épisode 4... et fin)

Et voilà ! Le dernier volet de nos entretiens avec RJ Ellory. Cette fois, il nous parle de sa passion pour la musique, et il a même fait l'effort surhumain de choisir ses 20 albums préférés, ceux qu'il emporterait sur une île déserte. Et ce n'était pas facile.
En guise de feu d'artifice final, le Blog du polar n'a reculé devant aucun sacrifice et a demandé à RJ de répondre au questionnaire de Proust ! Un peu cliché, peut-être, mais très révélateur. Ce n'est pas pour rien que ce questionnaire est devenu un classique... Et pour finir, quelques indiscrétions sur ses projets. Bonne lecture !


L’écriture et la musique

Vous êtes guitariste, tendance blues rock. Ce genre s’est-il imposé naturellement, par exemple parce que dans un groupe de blues, les musiciens et notamment les guitaristes ont la latitude de s’adonner à de longues improvisations au cours desquelles ils s’expriment librement ?
Ma passion pour la musique est née très tôt. J’ai éprouvé une empathie évidente pour la littérature américaine, et il s’est produit la même chose pour le jazz, le blues et la country. J’en ai d’ailleurs longuement discuté avec mon ami Antoine de Caunes ! Un jour, quelqu’un m’a dit que la musique était le moyen de traduire des émotions en sons, puis de les transmettre à quelqu’un d’autre qui à son tour les retraduisait en émotions personnelles. Je suis d’accord avec cette approche. Je pense que la bonne littérature fonctionne sur un plan émotionnel, et je suis persuadé que c’est la même chose pour la bonne musique. Quant aux longues improvisations, ce n’est pas vraiment mon genre. Quand j’écris une chanson, je veux qu’elle transmette un message émotionnel. Quand le message passe, alors c’est que la chanson est terminée.

Avez-vous été influencé par la vague du “blues blanc” née en Angleterre dans les années 60 et 70, ou plutôt par les bluesmen d’origine ?
En fait, les deux m’ont influencé. J’écoute de tout : cela va de Son House et Blind Willie McTell à Led Zeppelin (ils sont de Birmingham), en passant par tout ce qu’il y a entre les deux ! On ne peut pas comprendre la musique contemporaine occidentale si on n’aime ni Lightnin’Hopkins, ni Muddy Waters, ni Bob Wills, ni Johnny Cash, ni Chet Atkins ou Howlin’ Wolf. Ils sont tous là, dans le creuset, tout est là, du zydeco au rap, tous sont importants.

 Lisez-vous la musique ?
Je lis les partitions pour trompette, mais pas pour guitare. Et je ne joue plus de trompette… Difficile de chanter en jouant de la trompette !

De la trompette ?
Oui, j’ai appris quand j’étais enfant. En fait, je voulais faire de la clarinette mais il n’y avait pas de prof de clarinette là où j’étais. A 16 ans, je me suis fait voler ma trompette, et comme je n’avais pas les moyens d’en racheter une, j’ai arrêté…

Comment décririez-vous la différence entre la musique et l’écriture en tant que mode d’expression ?
Je crois que les deux sont très proches. En littérature, on suscite l’émotion avec des mots. En musique, on utilise les sons. À mon sens, écrire une chanson, c’est comme écrire un chapitre. Écrire un album, c’est comme écrire un roman. Les deux doivent transmettre un message émotionnel, les deux peuvent le faire, seuls les moyens diffèrent.

Dans une de ses interviews, Elliott Murphy disait : “Si vous jouez un blues à l’envers, vous sortez de prison, votre femme revient et vous retrouvez du boulot !" Est-ce que ça marche ?
Ca c’est fantastique! Et si je joue de la country à l’envers, je récupère mon chien et mon pick-up ? Je vais essayer, je vous raconterai. Quoique finalement… je n’ai pas très envie que ma première femme revienne…

Combien y a-t-il de musiciens dans votre groupe, les Whiskey Poets ? Quels sont vos projets musicaux ? Aurons-nous l’occasion de vous voir sur scène ?
Nous sommes trois, et le groupe est récent. Nous répétons cinq ou six morceaux que nous enregistrerons au mois de mai. Après, pourquoi pas une tournée ?

Les 20 albums que vous emporteriez sur une île déserte
Jimi Hendrix – Electric Ladyland
The Thirteenth Floor Elevators – Bull of the Woods
Gene Casey & The Lone Sharks – Rhythm ‘n’ Twang
The Gun Club – The Las Vegas Story
Jeffrey Lee Pierce Quintet – Wildweed
Bo Diddley – Hey! Bo Diddley
Captain Beefheart & The Magic Band – Safe as Milk
Cream – Disraeli Gears
The Doors – The Doors
Sir Douglas Quintet - Mendocino
Dr. John – Gris-Gris
Elvis Presley – The Sun Recordings
Holly Beth Vincent – Holly & The Italians
Jefferson Airplane – Surrealistic Pillow
John Martyn – Solid Air
Van Morrison – Astral Weeks
Kelly Joe Phelps – Shine-Eyed Mister Zen
Led Zeppelin – Led Zep 1
Paul Butterfield Blues Band – The Elektra Years
Roky Erickson & The Aliens – The Evil One

Questionnaire de Proust revisité

Votre vertu préférée
L’intégrité, la volonté de tenir sa position quelles que soient les critiques et les oppositions.

Votre qualité préférée chez un homme
Le respect de la parole donnée

Votre qualité préférée chez une femme
L’empathie

Votre trait de caractère le plus marquant
La persévérance

Ce que vous appréciez le plus chez vos amis
La camaraderie

Votre principal défaut
L’impatience

Votre occupation favorite
L’écriture

Votre conception du bonheur
De bons amis, une bonne table, du bon vin, une bonne conversation

Votre conception du malheur
L’émotion qui survient quand on doit affronter un échec personnel.

Si vous n’étiez pas vous-même, qui aimeriez-vous être ?
Kelly Joe Phelps, ou un autre guitariste et chanteur de blues.

Où aimeriez-vous vivre ?
À Upstate New York.

Votre couleur préférée
Bleu céruléen

Votre oiseau préféré
Le héron

Vos auteurs préférés (littérature)
John Steinbeck, Annie Proulx, Tim O’Brien, Cormac McCarthy, Raymond Chandler, William Faulkner, Truman Capote, Flannery O’Connor, etc., etc.

 Vos poètes préférés
William Carlos Williams, Walt Whitman, Robert Frost, Emily Dickinson

Vos héros de fiction préférés
Sherlock Holmes, Philip Marlowe, le Sergent Bilko (de la comédie Sergent Bilko, de Jonathan Lynn, qui raconte l’histoire d’un sergent vraiment atypique, joueur, indiscipliné, as de la combine - NDT), Bad Blake (le héros du roman Crazy Heart de Thomas Cobb, adapté au cinéma par Scott Cooper, qui raconte l’histoire d’une ancienne star de country déchue, incarnée par Jeff Bridges - NDT)


Les personnages historiques que vous détestez
Hitler, Hesse, Goebbels, Himmler, Eichmann, Mengele etc., Tony Blair, George Bush, George W. Bush, Hoover, Harold Wilson, Staline. Je fais ce que je peux pour ne haïr personne, mais il y en a qui le méritent vraiment !

Votre boisson et votre plat préférés
Le Jack Daniels et les Buffalo wings (ailes de poulet frites à la sauce pimentée - NDT)!

Le don de la nature que vous aimeriez avoir
Un don extraordinaire pour jouer de la guitare.

Comment souhaiteriez-vous mourir ?
Très vieux, et encore au travail !

Votre devise
La réussite est entièrement fonction de la constance de l’objectif (Benjamin Disraeli).

Pour quel défaut avez-vous le plus d’indulgence ?
L’impatience

Quel est l’état présent de votre esprit ?
Déterminé !

Et pour finir, un mot de vos projets ?
Saints of New York paraîtra en France début 2012. Je travaille en ce moment à un roman qui se passe en 1974 dans le Tennessee, à la fin de la période du Watergate. Le personnage principal est un jeune shérif qui enquête sur le meurtre rituel et étrange d’un adolescent. Au cours de son enquête, il est confronté avec les fantômes de son vécu pendant la guerre du Vietnam. Quelque part entre Apocalypse Now et Angel Heart ! En fait, en ce moment, je fais une pause dans l’écriture. Mon prochain manuscrit doit être livré à mon éditeur anglais dans un an, je me suis donc offert un peu de temps que je vais consacrer à mes projets musicaux.

1 commentaire:

  1. Merci pour cette magnifique interview, c’était passionnant d'en apprendre davantage sur cet auteur de grand talent !

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