2 janvier 2012

Denise Mina, "La mauvaise heure" : Paddy Meehan, episode 2

Dans Le Champ du sang, nous avions laissé Paddy Meehan, à l'issue d'un rude combat pour la vérité, à son triste sort de grouillot au Scottish Daily News. Au début de La mauvaise heure, Paddy a pris du galon. Un peu seulement : elle est désormais préposée aux faits divers, et affectée à l'équipe de nuit. Elle sillonne donc les rues de Glasgow en compagnie de son dévoué chauffeur Billy, en quête d'un accident, d'une bagarre d'ivrogne, d'une scène de ménage ou d'une bagarre entre truands. La vie est dure pour Paddy : son père a perdu son emploi, et elle est désormais la seule à rapporter un salaire à la maison. En plus, sa sœur préférée, Mary Ann, a versé dans le mysticisme et n'est plus la confidente idéale quand il s'agit pour Paddy de partager ses angoisses ou sa solitude. Pour tout arranger, elle apprend que Sean, son ex-fiancé avec lequel elle a conservé des rapports ambigus, va se marier...
Cette nuit-là, c'est sur une scène de violence à domicile que Paddy est envoyée. Contrairement à ce qu'on pourrait attendre, ça ne se passe pas dans les quartiers populaires, mais dans un coin chic, plus précisément chez la jeune avocate Vhari Burnett, connue pour ses engagements humanitaires. Devant le domicile de la dame, un homme très séduisant s'explique avec la police, qui ne tarde pas à plier bagage. Querelle d'amoureux... Paddy s'approche du bellâtre, s'apprête à lui poser ses questions, quand l'homme lui fourre dans la main un billet de 50 livres plein de sang, autant dire une fortune pour Paddy. Le prix du silence... Mais Paddy n'a pas les yeux dans sa poche. Quand elle regarde à l'intérieur de la maison, elle aperçoit le visage ensanglanté de la blonde avocate, qui lui fait signe de ne pas insister. Un coup pour rien, apparemment. Sauf que le lendemain matin, Vhari Burnett est retrouvée morte, la mâchoire littéralement fracassée, le crâne défoncé. Bien commodément, son ex-fiancé, lui aussi engagé auprès d'une association humanitaire, est retrouvé noyé. Il se serait suicidé... Le conditionnel est de rigueur ! Et voilà notre Paddy préférée confrontée à un cruel dilemme : rendre le billet ou le garder, au risque que quelqu'un l'ait vue l'empocher ? Et surtout, elle se sent coupable. Si elle avait insisté, peut-être Vhari serait-elle encore vivante. Et enfin, qui a tué cette femme ? Qui était le bellâtre ? Vous l'avez compris, Paddy est sur le sentier de la guerre, et celui qui l'arrêtera n'est pas encore né !
Côté journal, c'est la crise : le rédacteur en chef vient d'être congédié et remplacé par un type venu de Londres dont tout le monde se méfie. Tous les reporters craignent pour leur place, à commencer par Paddy, qui s'est mise dans une sale situation. Elle n'en continue pas moins son enquête, et frôle la catastrophe le jour où son chauffeur manque se transformer en torche vivante, victime d'un attentat alors qu'il l'attendait dans la voiture. Culpabilité encore et toujours pour Paddy, qui en sait beaucoup trop, tellement qu'elle est obligée de se cacher dans une chambre d'hôtel. Ceux auxquels elle s'attaque ont du répondant et ne reculent devant rien... Trafic de drogue, tueurs ultra-violents, flics pourris, rien ne lui sera épargné. Pas plus qu'à Kate, la soeur de Vhari, complètement défoncée et qui, elle aussi, en sait beaucoup trop. Camée, mais finalement solide, Kate doit fuir devant des poursuivants bien décidés à lui faire la peau, et qui ne sont pas étrangers à la mort de sa soeur.
Denise Mina poursuit avec énergie son portrait au vitriol d'une Écosse victime du thatcherisme, tout entière incarnée par Paddy, l'irlando-écossaise toujours aussi attachante dont l'évolution psychologique est aussi passionnante que l'intrigue du roman. Plus solitaire que jamais, malgré quelques frasques en compagnie d'un flic sexy et doué pour la stand up comedy, Paddy poursuit son chemin dans un métier qui la fascine et l'effraie tout à la fois. On a peur pour elle, on la suit de bout en bout sans pouvoir refermer le livre, et encore une fois, on a hâte de la retrouver, très bientôt.
Denise Mina, La mauvaise heure, traduit de l'anglais par Oristelle Bonis, Le masque / J'ai lu

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