8 décembre 2013

Le démon des armes (Gun Crazy) : un bijou de film noir restauré et présenté au Film noir festival de Gisors

Réalisé en 1950 par Joseph H. Lewis, ce film était invisible depuis longtemps. Il a fait l'objet d'une restauration qui a permis au Film noir festival de Gisors de le présenter ce soir. On dit souvent que l'âge d'or du film noir correspond aux années 40, avec les chefs d’œuvre de Howard Hawks, John Huston, Raoul Walsh, Nicholas Ray ou Fritz Lang. Pourtant, la décennie suivante réserve encore de belles surprises, dont la plus marquante est sans doute le En quatrième vitesse de Robert Aldrich, sorti en 1955. Le démon des armes fait partie de ces découvertes tardives et sous-estimées. Joseph H. Lewis a la réputation de privilégier le style par rapport au contenu. Ici, les deux sont parfaitement équilibrés. Le démon des armes, tourné en 30 jours pour 400 000 $, est notamment apprécié par Martin Scorsese qui dit de ce film qu'il est "sans répit, totalement prenant". Et ça n'est pas moi qui vais lui donner tort.

L'histoire : Bart, un jeune garçon obsédé par les armes et pourtant incapable de tuer le moindre être vivant se retrouve en maison de redressement après avoir fracassé une vitrine pour dérober les pistolets dont il rêve. A son retour dans le monde des vivants, il rencontre une jeune femme, Annie Laurie, qui fait un numéro de tir pour une sorte de cirque ambulant. Tireur hors pair, le héros est aussitôt engagé pour faire équipe avec la star de la gâchette. Ça ne dure pas longtemps. Les deux tireurs tombent amoureux et se font lourder par le patron, amoureux de la "shooting star". Ces deux-là ne savent pas faire autre chose que tirer. Annie a des goûts de luxe et n'est pas du genre à faire des ménages... Démarre alors une longue dérive en forme de fuite en avant à la Bonnie and Clyde, fin dramatique à l'appui. Lewis excelle dans le gros plan, les jeux d'ombres, les angles inattendus qui montrent des détails révélateurs. Il cisèle le déroulement du film en forme de lente décadence, avec une évolution spectaculaire mais subtile de l'apparence physique de ses héros. Le film, qui commence comme une banale série B américaine, se transforme minute après minute en un petit chef-d’œuvre du cinéma noir, une descente aux enfers violente et littéralement sculptée par le noir et blanc, une femme aussi fatale qu'on peut l'imaginer. Guettez donc les programmations, les festivals, et les sorties en DVD. 

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